Avis de Alexandre : "Il n'y avait jamais de beau temps dans ce pauvre paysage, Il n'y avait jamais de printemps. Ni derrière, ni derrière. Il n'y avait jamais de printemps, Ni derrière, ni devant."
En matière de BD autour de la Shoah, on dispose aujourd’hui de nombreux titres mais peu existent pour les jeunes d’environ dix ans. Cette question est pourtant au programme d’histoire du CM 2 et il faut d’ailleurs rendre hommage au très remarquable travail de formation accompli par le Mémorial de la Shoah en direction des professeurs des écoles (voir à ce propos http://www.memorialdelashoah.org/pedagogie-et-formation/formations-et-universites/enseignants-du-primaire/universites-dete.html. )
En cette matière la lecture de Shoah et bande dessinée: l’image au service de la mémoire ne nous a rien appris. En fait pour des jeunes autour de dix ans, selon nous en matière d’album assez centré sur la question, on ne dispose selon nous actuellement que deux titres. Le premier est la BD Un été en enfer: camp de Natzweiler-Struthof 1942 (non signalée dans Shoah et bande dessinée: l’image au service de la mémoire) ; le deuxième est Irena, 1 Le ghetto de Morvan, Evrard, Tréfouël et Walter mais n’est sorti que début 2017. Le deuxième volume de Herr Doktor devrait aborder la question mais on sait que le scénario du premier présente des aspects assez abracadabrantesques.
Bref on ne peut que se féliciter de la parution de la BD Rescapés de la Shoah, ceci d’autant qu’il s’agit de la mise en images d’histoires authentiques d’enfants de l’époque qui ont survécu à ces évènements tragiques et sont encore en vie en janvier 2017. Chaque récit couvre une quinzaine de pages ; on découvre successivement l’histoire de Heinz, Trude, Ruth, Martin, Suzanne et Arek.
Le premier témoignage, celui de Heinz, permet d’évoquer la Nuit de cristal et l’internement des juifs adultes d’origine allemande réfugiés dans l’espace européen ou colonial du Royaume-Uni durant toute la durée de la Seconde Guerre mondiale. Trude est tchèque, elle quitte la Tchécoslovaquie une semaine après l’arrivée des Allemands et elle évoque la vie qu’a pu connaître sa mère dans un camp de concentration.
Extrait de la version anglaise
Ruth vivait en Allemagne mais près de la frontière tchécoslovaque et c’est l’occasion de parler des Accords de Munich de 1938. Une employée de l’ambassade britannique a fait sortir d’Allemagne cette enfant et son frère. Les deux enfants y arrivent le jour où le Royaume-Uni déclare la guerre à l’Allemagne.
Martin vivait en Allemagne lorsqu’en octobre 1938 des juifs d’origine polonaise sont expulsés et ils s’installent provisoirement à Cracovie. Plus tard une famille anglaise accueille Martin et sa sœur à Coventry et ils vivent les intenses bombardements allemands de 1940 et 1941 sur l’Angleterre. Suzanne habitait Paris et au début de l’Occupation ses parents sont arrêtés ; une voisine laisse croire que Suzanne est sa fille. Ensuite elle doit se cacher à Mondoubleau (entre Orléans et Le Mans) puis en Auvergne.
Arek est polonais et il est emmené à quatorze ans d’un ghetto vers Auschwitz. Pour des récits historiques, on relève malheureusement souvent l’absence de dates et cette dernière histoire récit en est le plus parfait exemple. Une double-page donne des indications assez brèves sur ce que sont devenus adultes les six personnages, ces derniers vivent tous aujourd’hui en Angleterre.
Illustré dans des tons principalement sombres de bleu, brun et gris, le graphisme épuré porte le désespoir global des divers narrateurs. On notera que tous les personnages n’ont qu’un blanc pour œil, l’iris a disparu. En fin d’ouvrage une chronologie rappelle les principaux événements allant de janvier 1933 (Hitler est nommé chancelier) à août 1945 (le Japon signe sa capitulation). On a aussi une double-page portant un glossaire, un index permettant entre autre de retrouver quels pays et personnalités historiques sont évoqués et enfin un renvoi à des sites internet.
Notons que cet ouvrage sort en France quasiment pour le 27 janvier, journée pour ce pays de la mémoire de l'Holocauste et de la prévention des crimes contre l'humanité ; c’est en effet le jour de la libération du camp d'Auschwitz. Il était déjà ru en 2016 en Angleterre sous le titre Survivors of the Holocaust, il est tiré du film d’animation The children of the Holocaust (voir extraits à https://vimeo.com/112911926).
coup de coeur !Accessible jeunesse Beaucoup d'illustrations