Avis de Zaynab : "La feignasse qui a mis des cartes des frontières de 2016 pour un récit de 1941 a gagné le qualificatif d’enfant de Kaunas"
Le récit part de Kaunas, qui fut capitale de la Lituanie de 1920 à 1940, et aboutit jusqu’au-delà du cercle polaire au bord à un peu plus de 72° de latitude au bord de la mer de Laptev (rappelons que le Pôle Nord est défini à 90°). Les deux cartes destinées à montrer le voyage effectué par l’héroïne en 1941 et 1942 ne sont présentées que pour « donner au lecteur une idée de la distance énorme que Lina et sa famille ont parcourue » avec des frontières qui datent du début du XXIe (avec d’ailleurs en prime des erreurs sur la situation en 2015 puisque la Slovaquie et le Monténégro n’apparaissent pas). Or en juin 1941 au moment où commence le récit après la signature du pacte germano-soviétique les frontières de l’URSS et de l’Allemagne nazie s’étendent le long d’environ 500 km et passent par le sud de la Lituanie que l’URSS vient d’annexer. Quand en plus il s’agit là d’une édition jeunesse, on se dit que par incompétence et flemmardise quelqu’un n’aide vraiment pas le jeune lecteur à comprendre le contexte de l’action. Heureusement que page 19, mais en une seule phrase courte, l’auteure éclaire la situation. Un roman historique peut permettre à mieux appréhender des situations historiques et l'occasion était belle de voir en plus pourquoi les Allemands arrivent si vite à Leningrad et Moscou en décembre 1941.
C’est le récit de la déportation d’une famille lituanienne, dont le père est un universitaire, qui s’apprêtait à passer la frontière avec toute sa famille pour arriver du côté allemand, ce que la "géniale carte" proposée rend impossible à comprendre. Le père est séparé de la mère et des enfants lors de la déportation. Ce récit, où la narratrice est la fille aînée de la famille en question (une jeune de quinze ans) est totalement fictif mais rend compte d’une réalité de déportation de nombreux membres de peuples non russes de l’URSS dans l’année 1941 puis après-guerre pour prétendue collaboration avec les Allemands.
On peut relever ces deux passages :
« - Comment peuvent-ils décider que nous sommes des animaux ? Ils ne nous connaissent même pas.
- Nous nous connaissons, répondit Mère. Ils se trompent. Ne leur permet jamais, Lina, de te convaincre du contraire. Comprends-tu ?
J’acquiesçai d’un signe de tête. Mais je savais qu’un certain nombre de nos compagnons s’étaient déjà laissé persuader de leur condition inférieure. Ils avaient une expression abattue, dénuée de tout espoir et se faisaient tout petits devant le NKVD. J’aurais voulu les dessiner tous ».
« Les questions de Mr Stalas que je ne cessais de retourner dans ma tête m’avait tenue éveillée. Etait-il plus difficile de mourir ou de survivre ? J’avais à peine seize ans, je n’étais qu’une petite orpheline perdue aux confins de la Sibérie, mais je connaissais la réponse. C’était même la seule chose dont je n’avais jamais douté. Je voulais vivre. Je voulais voir mon frère grandir. Je voulais revoir la Lituanie. Je voulais respirer l’odeur du muguet que la brise transportait jusque sous ma fenêtre. Je voulais peindre dehors, dans les prés. Je voulais revoir Andrius avec mes dessins. Il n’y avait que deux issues possibles en Sibérie : ou bien survivre, c’est-à-dire réussir, ou bien mourir, autrement dit échouer. J’avais choisi la vie. J’avais choisi de survivre ».
L’ouvrage a reçu le Prix des incorruptibles en 2014 pour les classes de troisième et seconde.
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