Avis de Xirong : "Une enfance dispersée comme les étoiles dans le ciel et les pions sur l’échiquier"
KYUKKYUPON (きゅっきゅぽん) est une dessinatrice de mangas qui a sorti cette série au Japon en quatre volumes, parus de 2012 à 2018.L’action démarre avec l’arrivée à Shanghai d’une famille japonaise dix ans après le début de l'ère Showa. On est en 1936, soit un an avant que la guerre entre le Japon et la Chine n’éclate officiellement ; toutefois depuis les années 1920 d’abord sur la question de l’ancienne colonie allemande de Qingdao puis sur la transformation de la Mandchourie en un état fantoche presque concomitante avec une première incursion à Shanghai de 80 000 hommes de l’armée japonaise, soutenus par 80 navires de guerre et 300 avions, les tensions sont très vives entre Chinois et Nippons.
Si les Européens et Américains logent dans la concession internationale et la concession française, les Japonais se concentrent dans le quartier de Hongkou. Un plan illustré de Shanghai est présenté page 84 de cet album ; on y voit aussi distinctement le quartier de Pudong où on trouve alors encore des rizières et où se concentrent les Chinois les moins fortunés. On a par ailleurs des vues de la ville, dont une double-page sur le Bund, où se concentrent les gratte-ciels de l’époque.
La jeune Haru est une enfant japonaise qui a alors environ une demi-douzaine d’années, elle vient avec son père et sa mère dans la métropole chinoise. Bien que l’on ignore la profession du père, on comprend qu’il a à Shanghai un emploi très rémunérateur. La jeune Japonaise sympathise avec un Chinois de deux à trois ans plus vieux qu’elle ; ce dernier vit de petits boulots mais passe aussi une partie de son temps à dessiner. Chacun à leur tour, ils vont être victimes de l’agressivité des membres de la communauté de l’autre, ceci déjà avant que n’éclate le conflit officiel. Le scénario n’est pas sans rappeler Les aventures de Yaya, mais si Tuduo (l’ami de cette dernière) ressemble un peu au Xing ("étoile" en chinois) de note récit, par conte Yaya est une enfant de la bourgeoisie chinoise.
On peut regretter que certains idéogrammes aient été recopiés avec des formes fantaisistes, je pense en particulier à 你 (toi) page 87. Ceci est d’autant plus regrettable que l’on a quelques phrases ou expressions chinoises (traduites en français) qui intéresseront les débutants dans l’étude du mandarin, qui utilise les mêmes idéogrammes que le dialecte de Shanghai dans lequel l’héroïne communique avec son ami chinois. La prononciation est très différente mais la syntaxe est proche entre ces deux langues chinoises. Lorsque les personnages s’expriment dans des bulles au contenu uniquement en français, cela veut dire qu’ils parlent en japonais. Notre titre fait allusion à une expression chinoise, à savoir "dispersé comme les étoiles dans le ciel et les pions sur l’échiquier " (星罗棋布 xīngluóqíbù).
coup de coeur !Pour tous publics Beaucoup d'illustrations