Avis de Adam Craponne : "Car Dieu a tant aimé la France qu’il lui a donné son fils inique Pétain"
Notre titre est une double allusion à cette parole du Nouveau testament « Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique » (Jean, verset 16) et à celle du Maréchal Pétain prononcée le 17 juin 1940 à la radio « je fais à la France le don de ma personne pour atténuer son malheur ».
Charles-Roux est l’ambassadeur de la France au Vatican de 1932 à début 1940. En février 1939 Pie XI décède et Charles-Roux incite les six cardinaux français plus trois évêques étrangers liés à la France à voter pour Mgr Pacelli, anciennement nonce apostolique à Munich puis Berlin de 1917 à 1929 et secrétaire d’état. Élu pape, il le restera jusqu’en 1958.
Charles-Roux est nommé secrétaire général du quai d’Orsay, aussi à partir de la fin mai 1940 c’est Wladimir d’Ormesson qui lui succède au palais Farnèse. Ce dernier éditorialiste au Figaro, s’était vu confié plusieurs missions diplomatiques non-officielles dans les années Trente et c’est son premier poste d’ambassadeur. Il gardera cette place jusqu’en octobre 1940.
Il est remplacé par Léon Bérard qui figure au centre de la photographie choisie pour couverture. Député puis sénateur des Basses-Pyrénées, il est connu comme ministre de l’Instruction publique pour avoir supprimer la filière moderne dans les lycées, mesure que la victoire du Cartel des gauches en 1924 rendra inapplicable. S’étant rapproché de l’Action française dans l’Entre-deux-guerres, il vote bien entendu les pleins pouvoirs à Pétain. Lorsque le 6 juillet 1944 le général de Gaulle est reçu par le pape, Léon Bérard est toujours l’ambassadeur de la France auprès du Saint-Siège et ce n’est qu’après avoir appris le départ forcé vers l’Allemagne du maréchal Pétain le 19 août qu’il accepte de démissionner, ce qu’il fait le 24 août. C’est Hubert Guérin qui prend sa suite en tant que représentant du gouvernement du général de Gaulle.
Mgr Valeri était nonce apostolique à Paris depuis 1936, il rejoint Vichy où il loge Maison du missionnaire. Il restera en place jusqu’au départ du maréchal Pétain de Vichy, le général de Gaulle exigera du pape qu’il nomme un autre nonce, jugeant que Mgr Valeri a trop pris publiquement parti pour les gouvernements du maréchal Pétain. L’ouvrage tourne autour de l’action de Mgr Valeri à Vichy et de Léon Bérard à Rome pour entre autre s’interroger sur la façon dont les persécutions contre les juifs sont perçues. On connaît souvent la conclusion d’un rapport sur ce sujet de Léon Bérard au Maréchal Pétain et le fait que ce soit ce dernier qui le demande en personne prouve l’importance que le chef de l’État français trouve à connaître cette opinion. Rappelons quelle est cette conclusion :
« Comme quelqu’un d’autorisé me l’a dit au Vatican, il ne nous sera intenté nulle querelle sur le statut des juifs ». (page 127)
En fait Dominique Chassard montre que justement le Pape considère comme totalement injuste le sort des juifs convertis et rappelle que la charité du Christ s’adresse à tous les hommes. Pour tranquilliser le maréchal Pétain, Léon Bérard rappelle que l’Église ne s'est jamais élevée contre les mesures législatives antisémites prises en Italie, alors que ces dernières interdisent le mariage entre juif et non-juif, ce qui n’est pas le cas avec les mesures prises en France. L’intérêt de ce livre est qu’il reste centré sur son sujet et il ne faudrait pas aller chercher là un portrait, même à grands traits, de l’Église de France sous l’Occupation.
Pour tous publics
