Avis de Alexandre : "Retour vers un haut fonctionnaire du génocide cambodgien"
Le tortionnaire en question កាំង ហ្គេកអ៊ាវ est connu non seulement sous les surnoms de "Deuk" ou "Deuk", "Douch", "Duch" ou "Deuch", son nom en Occident étant traduit par Kang Kek Ieu ou Kaing Kek Iev ou Kaing Guek Eav. En 2011 Rithy Panh avait produit un documentaire Duch, le maître des forges de l’enfer qui fut largement primé, ce sont des entretiens que donna Duch en 2010.
Toutefois en 1999, deux jours avant son arrestation et alors qu’il a été démasqué depuis environ une semaine par le photographe Nic Dunlop, il donne un interview (uniquement oral, à l’exception de quelques minutes de vidéo) à deux enquêteurs du Bureau du Haut Commissariat de l’ONU pour les droits de l’homme. Ces derniers tombent d’accord que cet entretien sera transmis au tribunal qui pourra lui assurer un procès équitable. Ce fut le cas en 2006 (pour un premier procès ayant eu lieu en 2009), même si pour des raisons complexes (en partie liées à des pressions du gouvernement d’alors du Cambodge sur Duch), ce dernier revint sur les conditions dans lesquelles cet interview fut réalisées.
Duch est issu d’une famille en partie khmet et en partie chinoise (d’ailleurs comme Pol Pot, Ieng Sary ou Khieu Samphan), il est fils de paysans et c’est grâce à une bourse qu’il peut devenir professeur de mathématiques dans l’enseignement secondaire. Vers l’âge de 25 ans il prend le maquis en 1967, arrêté moins d’un an plus tard, il doit sa libération au coup d’état pro-américain du 18 mars 1970 du général Lon Nol. Il dirige ensuite une prison des maquis khmers rouges (M13) où il agit pour faciliter la libération de l’ethnologue François Bizot.
Il a trente trois ans, lorsqu’il commence à diriger la prison Tuol Sleng ou S-21 (le site à l’origine un lycée est devenu le musée du génocide khmer). Ce centre d'interrogatoire, instruisait des cas de suspects afin d'obtenir la confession de leurs crimes (devenant parfois imaginaires, face à la torture). Moins de 200 survivants potentiels ont pu être identifiés parmi les quelques 14 000 personnes emprisonnés là. Si le livre pose la question de la responsabilité individuelle de Deuk, du fonctionnement de S-21 mais aussi à la fois de l’engrenage qui amène un idéaliste épris de justice à faire condamner des gens qu’il sait en partie innocent de ce qu’ils sont forcés de s’accuser. Les auteurs avancent que le régime khmer rouge était bien plus totalitaire que le régime nazi dans la mesure où celui-ci tolérait un certain refus d’exécuter des ordres et s’il sanctionnait cela la plupart du temps ce n’était pas par la mort. Alors que tous ceux, qui dans le Cambodge autour de 1980 témoignaient d’un refus de suivre les directives de l’Angkar, encouraient la mort.
Pour connaisseurs Quelques illustrations
https://www.20minutes.fr/monde/2577255-20190804-cambodge-ideologue-numero-2-khmers-rouges-nuon-chea-mort-93-ans