Avis de Ernest : "L’adultère enfant naturel de la guerre"
Cette histoire permet de retrouver quelques noms de féministes de la Belle Époque et d’aborder le fait que nombre de femmes trompèrent leur mari durant la Première Guerre mondiale. On sait que l’auteur des Croix-de-bois Dorgelès en bénéficiant d’une permission inattendue, acquit la certitude que sa fiancée avait un amant ; dans "L‘horizon de Blanche" Numance le poilu, mari de l’héroïne, repart sans ce doute mais se comporte de façon violente avec son épouse. De plus Blanche vivant à Paris, Numance n’a pas reçu de lettre d’une voisine qui se serait fait un plaisir de lui annoncer le manque de fidélité de son épouse. Une chance que n’ont pas certains soldats qui habitent la campagne, perspective qu’évoque le Périgourdin Alexandre Boisserie (sous-lieutenant réformé en 1916) dans Terre paysanne un roman publié, sous forme de feuilleton, dans le journal Le Populaire à la fin des années 1930. On sait que Le diable au corps de Raymond Radiguet fit scandale en 1923 en racontant les amours entre une jeune femme fiancée puis mariée et un très jeune homme qu’on qualifierait aujourd’hui d’adolescent.
Blanche, postière avant son mariage, avait dû devenir femme au foyer par la volonté de son mari. La guerre lui permettra de retrouver un emploi car nous la voyons passer un diplôme d’infirmière. Elle rencontre à plusieurs reprises Marie-Curie, un personnage qui est apparu dans les dernières années comme récurrent dans la production en matière de littérature de jeunesse qui traite de la Première Guerre mondiale. Ici en milieu urbain, mais aussi d’une autre façon en milieu rural où elles sont nommées "Les gardiennes" (Ernest Pérochon réutilisera cette appellation comme titre à un de ses romans qui se déroule entre 1914 et 1918), les femmes entrèrent dans la vie professionnelle et prirent des décisions seules alors que quelques mois avant elles étaient sous la tutelle légale de leur mari.
Le récit fait allusion à la proclamation du président de la République française publiée dans les journaux le 2 août, on peut dans notre critique en préciser le caractère rassurant:
« la mobilisation n'est pas la guerre ; dans les circonstances présentes elle apparaît au contraire comme le meilleur moyen d'assurer la paix dans l'honneur. Fort de son ardent désir d'aboutir à une solution pacifique de la crise, le gouvernement, à l'abri de ces précautions nécessaires, continuera ses efforts diplomatiques et il espère encore réussir. Il compte sur le sang-froid de la noble nation pour qu'elle ne se laisse pas aller à une émotion injustifiée ; il compte sur le patriotisme de tous les Français et sait qu'il n'en est pas un seul qui ne soit prêt à faire son devoir. À cette heure, il n'y a plus de partis, il y a la France éternelle, la France pacifique et résolue. Il y a la patrie du droit et de la justice tout entière unie dans le calme, la vigilance et la dignité».
La phobie des espions allemands trouve également sa place pour la même période, cette fois aux pages 60 et 61. En résumé voilà un roman assez court (car les pages sont d’un format de 10 x 18 cm) qui aborde la question de la condition féminine à deux périodes clés : celle de la fin de la Belle Époque où les manifestations pour obtenir le droit de vote et les écrits reflets de pensées féministes fort diverses et originales (l'ouvrage "De la Patrie à la Matrie" de Louise Grouès en est un bon exemple) sont abondants ainsi que celle de la Première Guerre mondiale où l’organisation sociale est largement bouleversée. "Les Dames du Chemin" de Maryline Martin est un recueil de nouvelles qui traite également de la Première Guerre mondiale.
Pour tous publics Peu d'illustrations
