Avis de Alexandre : "L'intégrale composée de trois tomes"
Le premier tome nous amène en Méditerranée où un bateau, parti d’un rivage calabrais d’une Italie encore neutre devrait arriver sur la côte albanaise en face. Il s’agit de livrer des armes aux Turcs en passant par ce pays et vraisemblablement ultérieurement par la Grèce car la Bulgarie n’entre en guerre qu’en octobre 1915 et jusqu’à cette date la Serbie contrôle sa partie macédonienne. Ainsi sans délivrer le moindre message didactique l’intrigue met en relief la situation dans les Balkans entre octobre 1914 (entrée en guerre des Turcs) et octobre 1915.
Toutefois la cargaison que les Anglais comptaient récupérer va prendre à la fin du premier tome la destination d’un Mexique en proie aux troubles révolutionnaires dus aux zapatistes et partisans de Pancho Villa. Ceci se fait progressivement et nous vaut un passage sinon épique du moins très homérique du détroit de Gibraltar et un arrêt bien plus calme à Saint-Nazaire. Liro Tana s’entretient régulièrement par l’intermédiaire d’un carnet avec un personnage féminin et cet objet est remis dans les mains de cette jeune femme justement à l’occasion du passage du bateau dans ce port breton.
Il s’avère qu’après avoir cru aux progrès qui semblaient porter l’Europe à la Belle Époque vers un avenir radieux, le capitaine Tana entend revoir sa conception des caractéristiques de la civilisation au regard de la grande boucherie qui se déroule sur le vieux continent entre 1914 et 1918. Un narrateur omniprésent jette un regard sans voile sur des actions souvent d’une rare violence malgré le très grand éloignement du front.
Les liens très forts, que Tana avait noués avec l’Amazonie, amènent ce dernier à réorienter sa propre destinée et celle de la jeune femme pour laquelle on découvre les liens qui les unissent. Le capitaine Tana a une silhouette qui rappelle un autre trafiquant d’armes, celui-ci bien français à savoir Henri de Monfreid. La Grande Guerre est vue comme le révélateur de l’immoralité et de l’arrogance de la civilisation occidentale en face d’îlots géographiques où auraient été préservées certaines valeurs : « la civilisation n’est pas du côté du monde auquel on pense ».Ici le dessin est très sobre et les couleurs magnifiques, la dimension onirique des paysages est fortement présente.
Une dimension affective unit certains êtres au milieu d’un univers qui les contraint ; ils disposent d’une petite marge pour tenter d’agir contre l’adversité afin d’essayer d’échapper à un contexte plus ou moins lié à une fatalité ou à des forces contre lesquelles la volonté individuelle a peu de prise. Bruno Le Floc’h, est décédé à Nantes le 5 octobre 2012, né à Pont-l’Abbé (dans le Finistère en 1957, c’est dans cette ville qu’il résidait peu avant son décès.
821 hommes sont à son bord, 684 périssent dont 166 Finistériens.
Voir La tragédie du croiseur Léon Gambetta. In "Penn ar bed", février 2015, n°136, p. 18-19.
VOIR http://www.cg29.fr/Magazine-Penn-Ar-Bed/Archives2