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1918 Demain la paix?

1918 Demain la paix?
SPM439 pages
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Avis de Alexandre : "La paix désirée mais chèrement payée par tous"

On retrouve avec plaisir des contributeurs dont on avait déjà apprécié, dans d’autres ouvrages fruits de colloques tenus à l’ICES de La Roche-sur-Yon autour de la Première Guerre mondiale, les qualités quasiment pédagogiques en économie comme Serge Schweitzer (avec ici une comparaison des finances publiques de la France et de l’Allemagne) ou Charlotte Nicollet aux angles d’attaque toujours percutants dans sa connaissance de la Bulgarie (elle aborde là la question des mutineries dans l’armée de ce pays en 1918). Elle a donné récemment également "Les Cobourg de Bulgarie à l’épreuve de la Grande Guerre" pour le numéro 264 de l'année 2016 de Guerres mondiales et conflits contemporains.

 

On a d’ailleurs d’autres contributions autour des Balkans : deux évoquent la naissance aux forceps de la Yougoslavie, un sur la Roumanie qui subit en 1917 le choc des armées bulgares, autrichiennes et allemandes plus le pillage des troupes russes venues à son secours et un quoique plus large autour de la chute de l’Autriche-Hongrie.          

 

On ne sera pas étonné que la renaissance de la Pologne n’ait intéressé deux auteurs, l’un réussissant, à partir de quasiment rien, à arriver vers des conclusions qui mettent en valeur les analyses de Maurice Schwob au Phare de la Loire, le  principal journal anticlérical de Loire-Inférieure de l’époque (d’habitude, on bouffe plutôt du laïc, à l’ICES). Stéphane Courtois a été convoqué pour approcher comment Lénine érige « la terreur de masse comme moyen de gouvernement du premier régime totalitaire de l’histoire » (page 303). S’il surveille évidemment ses écrits, il laisse quand même passer des commentaires fort personnels et donc fort hypothétiques comme celui où il croit pouvoir écrire que Lénine « eut un moment d’intense satisfaction » en organisant « avec méticulosité et dans le plus grand secret le massacre de la famille impériale » (page 300).   

 

La contribution de Renaud Meltz nous permet de voir qu’en Laval sommeillent déjà toutes les ambiguïtés possibles, on perçoit comment déjà le personnage sait louvoyer. Ce dernier retourne en 1919 à un pacifisme qu’il a mis sous sa manche durant le conflit ; il ne fait guère connaître son analyse du Traité de Versailles mais fait partie des socialistes qui votent contre.

 

Gérard Hocmar aurait pu nous épargner de traiter Clemenceau de "vieux chouan" (page 54), à la fois du fait des opinions du Tigre et parce que la chouannerie débute au nord de la Loire. On a la confirmation que Clemenceau s’intéressait peu aux colonies allemandes ou à celles à sa tailler dans les décombres de la Turquie (sa réponse à Ferry et son cadeau de Mossoul aux Britanniques sont connus). Son obsession est la garantie d’un appui contre une prochaine agression allemande. On reste évidemment gré à Gérard Hocmar de bien nous faire percevoir ce qu’il appelle "la mésentente cordiale" entre Clemenceau et Lloyd George, même s’il la réfute en toute fin d’article alors qu’elle nous semble fort conséquente d’après ce qu’il en dit tout au long de son texte.

 

L’idéologie de Maurras et de L’Action française trouve deux porte-voix ici, celle de Pascal Gourges est celle habituelle de Jean-Pierre Deschodt. Le premier disserte autour de l’idée du Martégal de faire payer à l’Allemagne les primes des combattants français, une fois la paix revenue, c’est un objectif social mais évidemment pas socialiste. Le second livre une contribution intitulé "L’Action française, la République et le prix du sang". Maurras croit que c’est en mettant sous le bras les idées démocratiques que la République a pu triompher de l’Empire allemand or c’est justement parce qu’il y a eu constamment, et même sous le gouvernement Clemenceau, un contrôle parlementaire que le pays a gagné le conflit. Faire de l’Affaire du Bonnet rouge une dérive logique des idées républicaines semble bien arbitraire. La fin de l’article revient sur le nombre de militants de l’Action française qui sont morts durent le conflit, les notices nécrologiques par dans le journal éponyme ne manquent en effet pas d’intérêt. Nous en avons d’ailleurs exploité une dans le passé, celle du Périgourdin Henry Cellerier, secrétaire de Charles Maurras. Jean-Pierre Deschodt discerne, du fait de l’engagement patriotique des juifs, une évolution de Maurras par rapport à l’antisémitisme.      

 

La présentation des caractéristiques de  la Grippe espagnole et de ses conséquences est traitée de manière experte sauf sur ses origines. La première manifestation du virus est relevée dans l’Arkansas dans une région de fort élevage porcin et aviaire. Il fallait lever l’hypothèque de migrants chinois, porteurs de la première forme de la maladie, débarquant en Californie, ce n’est pas fait ici. Thierry Lenz, connu pour ses ouvrages sur Napoléon Ier, traiter du retour de l’Alsace-Lorraine à la France ; il est vrai que c’est le neveu qui est la cause de cette absence de près d’un demi-siècle.

 

On a d’autres communications, parmi lesquelles on relèvera en particulier celle autour d’une Italie qui vit sa victoire dans la frustration et celle évoquant d’une Turquie défaite qui va se construire solidement sur de nouvelles bases dynamiques victorieuses dans les années 1920, bénéficiant d’ailleurs d’une certaine complicité des gouvernements français et des émissaires de ces derniers comme Franklin-Bouillon. On relèvera qu’une fois de plus les Belges ont eu une longueur d’avance sur les Français puisque les violences faites aux femmes, par l’usage de la tonte, se produisent déjà en 1918 outre-quiévrain. En France, il semble que dans certaines communes des Ardennes, il y eût quelques très rares cas semblables en 1918 mais ils ne furent pas médiatisés comme en Belgique où ils furent d’ailleurs bien plus nombreux. Cet article est dû à Laurence van Ypersele professeur à l'Université catholique de Louvain ; elle a codirigé l’ouvrage La Patrie crie vengeance ! La répression des inciviques après la guerre 1914-1918. On a une fois de plus (mais on ne s'en plaindra pas) l'exploitation d'affiches appartenant au Conseil Général de Vendée, cette foi cela donne l'article intitulé "Pour la victoire: l'emprunt s'affiche".        

Pour connaisseurs Peu d'illustrations

Alexandre

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