Avis de Octave : "La tzarine qui a bouché le port d'Odessa"
Un beau roman historique dans une forme qui fait des clins d’œil aux romans russes classiques. L’auteur nomme une palette de personnages mais sait limiter leur nombre à une vingtaine et l’apparition de certains à des phases précises du récit, il emploie aussi alternativement le véritable prénom et la forme affective que prend celui-ci. L’ouvrage permet au lecteur de vivre comme de l’intérieur la déliquescence de la Russie tzariste au début de l’année 1917 puis les deux révolutions successives et la fin tragique de la famille impériale, des étapes essentielles dans la Première Guerre mondiale. Ces évènements sont placés dans la chronologie avec l’évocation des pogroms et du Dimanche rouge du 9 (ou 21) janvier 1905. L’héroïne se veut plutôt actrice de l’Histoire qui s’écrit au début de l’ouvrage, puis devient de plus en plus sujette des évènements.
L’atmosphère de cette époque est bien rendue en donnant dans ce récit d’une quête une place à des personnages tenant un rôle de fonctionnaire ou d’indicateur de la police secrète, exprimant en tant que soldat leur défiance en la tzarine à qui les échecs de l’armée russe sont imputés par le rôle d’espionnage aux profits de ses anciens compatriotes qu’on lui attribue, montrant comme ouvrière les difficultés économiques dans lesquelles la guerre les a plongées …
En cherchant un journal clandestin dans la poche du mauvais pardessus l’héroïne découvre petit à petit les ressorts et les aboutissements d’un secret de famille. Celle-ci est une fille orpheline d’un comte russe et son enquête va l’amener à rechercher une personne puis un objet en étant en concurrence pour cela avec un officier de la police secrète qui désire trouver un moyen de lever le danger de mort sur le tzarévitch hémophile.
Sur la piste du bijou convoité (par elle et par d’autres) il lui apparaît un jour qu’elle a absolument besoin de l’aide d’un de ses frères présent sur le front. Arrivée près de la zone des combats, elle apprend sa mort récente et se voit offrir le carnet de souvenirs qu’il a laissé. Les dernières étapes du récit sont marquées par les approches successives de la famille impériale puis de Lénine pour se conclure par la concrétisation d’un amour. Une légère dimension paranormale imprègne l’ensemble du récit. Ce dernier, de par sa taille, la relative complexité de son contenu et les ressorts de l’action, nous semble devoir convenir parfaitement à un lectorat d’adolescentes ; il devrait bien plaire également à des garçons à partir de 13-14 qui ont un goût pour l’histoire ou pour les récits d’aventures.