Avis de Octave : "Tout tourne mal"
En publiant en feuilleton cet ouvrage, en 1931 le journal L’Humanité avait francisé le nom du héros en Chvéïk. C’est donc généralement sous cette orthographe que l’on trouve donné ce nom de personnage dans les nombreuses éditions hexagonales qui ont paru depuis 1932 pour les sorties sous forme de livre (la première vient de la NRF). Ont été reprises les illustrations très parlantes de Josef Lada, chose très exceptionnelle pour les traductions de de livre en français.
On a ici pour cette première partie des aventures de Švejk, plus de trois cent quarante pages. Une petite centaine de pages sont consacrées à donner diverses information sur Jaroslav Hašek et son roman entré dans le patrimoine de la littérature mondiale. En fait on a trois ouvrages pour les aventures du soldat : Le Brave Soldat ChvéÏk, Nouvelles aventures du brave soldat Chvéïk et Dernières Aventures du brave soldat Chvéïk.
Comme le titre français l’a précisé on est là dans l’arrière à savoir Prague et depuis juin 1924 jusqu’à la fin de l’année 1915, d’après les batailles évoquées et la visite de responsables turcs à Berlin et Vienne. L’ouvrage se termine par l’envoi au front du héros en compagnie de son lieutenant ; un fait ayant entraîné la colère du colonel entraîne le départ de l’officier qui rendant, à juste titre, Švejk à l’origine du problème, lui impose de le suivre à la rencontre des troupes russes.
Notre héros est mobilisé dans l'armé austro-hongroise et sa naïveté l’emmène à de nombreuses aventures successives. Jasroslav Hasek joue sur le côté comique des situations pour dénoncer le côté policier et le fonctionnement de divers aspects de la double monarchie, le rôle de l’Église et de certains de ses très dévoués fidèles prêts à faire passer les enfants des ennemis à la baïonnette (page 372), la vie des officiers autrichiens embusqués, les discours antiserbes, anti-italiens (les habitants de la botte étant perçus comme des traitres) et antiturcs (les Turcs étant pourtant des Alliés).
On notera d’ailleurs que le Praguois accusé de défaitisme s’écrie à la fin de son procès « Vive la Libre-pensée ». Par ailleurs les habitants d’Aspach-le-Bas, village du sud du Haut-Rhin, verront que l’on évoque leur "immense brasserie" (page 346) ; trois autres établissements de ce type sont cités, à savoir ceux d’Hartmannswiller, de Marchéville-en-Woëvre et de Combres-sous-les-Côtes (page 346).
Quelques citations :
« - Jésus-Marie, n'en v'là d'une nouvelle! s'écria Chvéïk. Et où est-ce que ça lui est arrivé, à l'archiduc, voyons?
- À Sarajevo. Des coups de revolver. Il y était allé avec son archiduchesse en auto. »
« Je vous déclare avec obéissance, monsieur l'aumônier, que je ne sais pas du tout comment je suis arrivé ici. Mais je ne me plains pas d'y être. Seulement, j'ai la guigne. Je n'ai jamais que de bonnes intentions et, à la fin du compte, tout tourne mal, je suis un vrai martyr… »
« Mon cher caporal, reprit le volontaire, les papiers n'arrivent pas tout seuls au commandant d'escorte. Si la montagne ne vient pas à Mahomet le commandant d'escorte doit aller lui-même chercher ses papiers. »
La dernière phrase étant :
« Je vous déclare avec obéissance, mon lieutenant, que je suis excessivement content, répondit le brave soldat Chvéïk ; cela sera quelque chose de magnifique quand nous tomberons ensemble sur le champ de bataille de Sa Majesté l'empereur et son auguste famille impériale et royale ... »
coup de coeur !Pour tous publics Beaucoup d'illustrations