Avis de Octave : "If we don't end war, war will end us (H. G. Wells)"
Comme Conan Doyle ou Rudyard Kipling, dont les reportages de guerre ont été réédités par le même éditeur en 2014, Herbert George Welles (1866-1946), auteur d’ouvrages de divers univers dont en particulier la science-fiction, part pour les fronts occidentaux en 1916. Il est embauché pour cela par le War Propagangda Bureau. Du point de vue politique, il se disait socialiste et pacifiste, ce qui rend d’autant plus intéressant ses écrits. En 1917 paraît l’ouvrage War and the Future: Italy, France and Britain at War qui est ici traduit en La Guerre et l’avenir: L’Italie, la France et la Grande-Bretagne en guerre. Wells auraient préféré le titre La guerre des idées, mais son éditeur lui a imposé ce titre plus explicite.
Wells a fermement soutenu la guerre de la Grande-Bretagne contre l'Allemagne afin que la terre soit débarrassée de la volonté de puissance allemande. En 1915 il a publié La guerre qui tuera la guerre. Il adhère largement à l’idée de la "der des ders" du fait de l’industrialisation que ce conflit a connu :
« tout en reconnaissant d’un côté que le développement de la guerre moderne, dont le tank est le symbole actuel, ouvre une perspective de destruction absurde et illimitée, d’un autre côté, elle ouvre la perspective d’un monde organisé et réfréné ».
« La conclusion de cette guerre doit être ce qu’on pourrait appeler un arrangement impartial ou, si vous préférez, un arrangement de traité, c’est-à-dire un arrangement basé sur la conception de ce qui est juste et nécessaire plutôt que sur le succès ou l’échec relatifs de l’un ou l’autre des adversaires ».
La première partie intitulée "La disparition de l’effigie " est très apologétique pour l’action des Alliés :
« Les Alliés combattent essentiellement pour une paix mondiale permanente ».
« (au sujet des généraux Pellé, Joffre et Castelnau) Ils font tous les trois l’effet d’être des hommes actifs et capables, accomplissant du mieux qu’ils peuvent un travail extrêmement compliqué et difficile, mais aussi très intéressant ».
« (par rapport à une réflexion du roi d’Italie) Je remarquai que cela montrait une certaine passion pour la paix et qu’une grande partie du mal venait de la propagande des grandes puissances ».
Le deuxième volet évoque justement la guerre sur le front italien et la vie à l’arrière dans la péninsule en 1916. L’auteur peut encore banaliser la combativité des armées autrichiennes et le peu de répercussions de la guerre sur la production agricole en précisant toutefois que cela se peut grâce à la relève des femmes (page 63). Les ambitions territoriales italiennes y sont avancées (une fois de plus) comme très raisonnables, ceci illustré là par le cas de Fiume devant devenir un port international ; bref on se demande à quel point l’auteur peut-il être aveugle sur ce sujet quand on connaît la littérature irrédentiste et la suite des évènements.
Carte des régions considérées comme italiennes par les irrédentistes après 1918
Le troisième volet permet d’évoquer la guerre dans l’hexagone, notre auteur se rend en particulier à Arras et Soissons. C’est dans la Somme que H.G. Wells prend pleinement conscience de l’évolution de l’armement et des techniques de camouflage (page 91). La dernière partie a pour nom "Ce que les gens pensent de la guerre" est une réflexion tous azimuts sur les conséquences de la guerre au présent et au futur. L’auteur évoque le cas des Anglais qui se déclarent objecteurs de conscience (pages 125 à 154) et un chapitre parle de renouveau religieux chez les Français à l’occasion du conflit sans en analyser les raisons profondes (espoir d’être épargné, traitement de faveur auprès d’une certaine catégorie du personnel soignant, aide financière à l’épouse d’un mobilisé). Welles souhaite l’intervention des USA aux côtés des Alliés et pense que ce pays pèsera beaucoup dans le contenu du traité de paix.
La couverture de l'ouvrage Ce que sera La Grande Paix paru en 1918
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