Avis de Alexandre : "Où le lecteur découve la cinq centième critique d’un ouvrage sur la Grande Guerre"
Pour l’approche du 11 novembre, nous avons compté les titres autour de la Première Guerre mondiale qui sont présentés sur le site. Le cinq centième sera donc consacré à une vision locale de ce conflit et concernera la Bretagne, ce dont nous nous réjouissons. L’ouvrage est préfacé par Christian Troadec, le maire de Carhaix qui connut une certaine médiatisation voici quelques années. En effet, il est sous-titré Carhaix et ses poilus, mais n’oublie pas pour autant la vie des civils.
Certains Bretons, les mêmes qui pensent qu’en 1971 le camp de Conlie fut un vaste cimetière de soldats armoricains, seront peut-être déçus d’apprendre que ce n’est pas 240 000 Bretons mais 135 000 qui prirent durant la Première Guerre mondiale (page 192). Tout le monde devrait d’ailleurs trouver que ce chiffre est déjà beaucoup. Si la Lozère connaît plus de 5% de pertes par rapport à sa population en 1911, la moyenne pour les cinq départements bretons est à 4,13 et encore en comptant tous les nombreux natifs de Bretagne qui résident ailleurs et principalement en région parisienne.
Carhaix est, en 1914, peuplée de 3 500 habitants ; c’est une commune du Finistère proche du point commun des limites entre ce département, les Côtes-du-Nord et le Morbihan. Elle a pour maire Ferdinand Lancien un laïc (député puis sénateur de 1914 à 1941) et les affrontements entre républicains et socialistes réunis face aux catholiques sont fréquents. Durant le conflit, il sera très actif pour tenter d’améliorer la situation de la population de l’arrière et il est significatif, que prenant conscience de l’arrivée massive des femmes dans les manufactures, il ait été le rapporteur du projet de loi tendant à créer des chambres d'allaitement dans les usines en 1916.
L’ouvrage est constitué des parties suivantes : Préface, Introduction, Carhaix et son canton, Les évènements majeurs d’avant 1914, La montée des périls et la mobilisation – La presse, Les héros de Carhaux, Les premières semaines de guerre, Le corps enseignant, soutien indéfectible de l’effort de guerre, Les œuvres de guerre, Vie chère et pénuries, L’hommage aux morts pour la France, Les combats et les hommes des 118e et 19e RI, Conclusion.
Des aspects généraux trouvent une belle illustration locale comme la rumeur propagée par Léon Daudet que les panneaux publicitaires Kubb sont porteurs d’indications destinées à l’armée française (page 84), la qualité du pain qui se dégrade considérablement au fur et à mesure avec l’instauration de tickets de pain au 1er mai 1918 (reproduction de cartes de tickets page 169), les motifs d’exécution pour les fusillés de corps d’armée breton (la moitié de cas relève de l’abandon de poste face à l’ennemi)…
L’ouvrage est assez illustré ; on relève en particulier le tableau Nord d’Arras 5 juillet 1915 du peintre breton Mathurin Maheut (page 227) dont la vie de soldat est prétexte à la BD Mathurin soldat, des articles de la presse de l’époque autour de l’arrivée de réfugiés belges (pages 88 et 89), la photo d’un invalide privé de ses deux jambes (page 98), une famille bretonne en costume folklorique confectionnant un colis pour un poilu représentée sur une carte postale et on sent le caractère très artificiel de la scène (page 129), la reproduction d’un poème autour de la bataille de Dixmude en Belgique où étaient présents de nombreux fusilliers-marins bretons…
C’est le premier ouvrage d’historien qui informe sur le montant précis de la solde et des pensions de veuve par grade (pages 94 et 96), 2 000 F pour la veuve de mon arrière-grand-père, ai-je appris. Pour information, à l’adresse de l’auteur, l’abréviation Xbre (page 60) ne signifie pas octobre mais décembre.
Pour tous publics Quelques illustrations
