Avis de Octave : "Je porte toute ma vie le poids du décès de mon pote"
En fait, n'ayant vraisemblablement pas réussi le concours d’École normale en Deux-Sèvres, il avait commencé à faire des remplacements dans les écoles durant l’année civile 1914. Ceci explique qu’au retour de la guerre il soit envoyé pour un an à l’École normale (formation pour personnes ayant des services de remplaçant). Jusqu’en 1940 il exercera la fonction d’enseignant, car il est frappé d’une mesure visant à exclure les francs-maçons. De 1945 à sa mort, il reprendra son poste à Thénezay.
La presse vichyssoise voire collaborationniste encensera son ouvrage "L'Ouche aux brebis" édité par Gallimard en 1941 dans la mesure où il raconte la vie d'une communauté paysanne vers 1900 à Aubigny dans les Deux-Sèvres, à travers un amour tragique entre deux personnes de milieux sociaux différents. Ceci sans jamais donner beaucoup de précision sur l’auteur.
"La première année" de Lucien Gachon voit une destinée parallèle, histoire d’un retour à la terre, il est écrit par un peu produit le l’École de la IIIe République, fils de paysan et ancien instituteur auvergnat devenu professeur de géographie. Si "L'Ouche aux brebis", avec parfois le titre "Deux Larmes" a été réédité plusieurs fois, par contre il faut saluer une fois de plus l’action de l’éditeur Marivole qui sort en mars 2015 "La vache et le veau" inédit car le manuscrit même avait été égaré.
"Le pote" est un récit très largement autobiographique qui raconte un quart de la Première Guerre mondiale à travers les péripéties vécues par Rallie, nom très proche de celui authentique de l’auteur.
Mobilisé en 1915, Germain Rallon est vraisemblablement d’abord au 114e RI de Saint-Maixent, il passe ensuite caporal au 405e Régiment d'Infanterie, et il est fait prisonnier à Verdun en 1916. Cela en fait un camarade de Jean Galtier-Boissière dont l’ouvrage "La fleur au fusil" et du professeur et écrivain Amédée Guiard (mort à Neuville-Saint-Vaast, lors de l'attaque du 28 septembre 1915). Commandé continuellement par le lieutenant-colonel Mauroit, ce régiment eu une existence éphémère de mars 1915 à juillet 1916 (il est dissous car décimé devant Verdun), il était constitué majoritairement de très jeunes recrues, en effet les trois cinquièmes avait eu 20 ans en 1915. D’après l’historique du régiment, nombre de ses appelés étaient originaires du Loir-et-Cher, du Loiret, de l’Yonne, de la Seine-et-Marne et de la Seine-et-Oise.
Paru en 1938 sous la plume d’un homme aux idées socialistes inquiet de la montée en puissance de l’Allemagne hitlérienne, cet ouvrage n’a aucune tentation haineuse envers l’ennemi. Le récit présente un Parisien qui affirme que
« Non les copains, ce sont les capitalistes qui saignent ainsi le peuple pour mieux l’asservie quand il a faim et qu’il commence à faire entendre sa voix ; notre ennemi, ce n’est pas le Boche, c’est l’or, c’est le capital, c’est le financier international » (pages 94-95).
Le narrateur parle non de "boches" mot d’un usage universel en France durant la Grande Guerre mais de "fridolins" à connotation nettement moins péjorative. D’ailleurs Robert Grassigoux dans un article de "La Dépêche du centre" du 25 novembre 1938 écrit :
« C'est un beau livre, d'un réalisme sans brutalité écrit d'une plume alerte, dans un langage clair et précis. On peut lire "Le pote" sans éprouver la haine de la guerre, et sans penser à ce que serait la guerre moderne, dont l'ombre menaçante rode toujours autour de nous ».
L’amitié entre deux soldats: le narrateur Rallie et Bouboule porte l’intrigue du roman "Le pote". Le narrateur a d’autant plus de mal à annoncer le décès de Bouboule à sa mère (page 142) qu’il a eu l'occasion de faire la connaissance de celle-ci lorsque leur régiment passe à Bar-le-Duc où elle tient un café (pages 110-117). Le récit s’arrête là devant Verdun avec cette mort. Même si Germain Rallon est fait prisonnier très peu après et part en captivité à Ingolstadt en Bavière (où il reste jusqu’à la fin du conflit), l’auteur n’a pu aller plus loin, cette mort ayant un caractère trop traumatisant pour lui. De nombreuses informations matérielles parsèment le récit et on retrouve cette très forte antipathie pour les mercantis qui viennent en particulier vendre du mauvais vins aux soldats dans la zone des armées (page 94). Des notes permettent en particulier d'expliquer certains mots d'argot du poilu.
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