Avis de Octave : "An dianav a rog ac’hanon (L’incertitude me dévore)"
Durant la Grande Guerre, du fait de l’importante population résidant dans les cinq départements bretons, plus de celle récemment immigrée à Paris et de la faible proportion d’ouvriers parmi celles-ci, les Armoricains sont très nombreux dans l’infanterie, l’arme où l’on est le plus exposé. La littérature et la presse prennent des couleurs patriotiques, et, bien plus que d’autres habitants de l’Hexagone, le combattant breton est valorisé et il n’est pas sujet à une campagne de dénigrement comme les soldats provençaux, comme l’a montré Jean-Yves Le Naour dans La légende noire des soldats du Midi. Ainsi, il est écrit page 196 de l’ouvrage Les Bretons et la Grande Guerre :
« Si pour suivre Pierre-Jakez Helias, plus rien ne sera comme avant, c’est peut-être du côté des représentations, des conceptions, et de l’altérité que la Première Guerre mondiale apparaît comme un marqueur fort de l’histoire bretonne. Elle utilise les stéréotypes mais, en changeant leur fonction, modifie leur signification : le plouc têtu devient un soldat tenace, la vieille devise « plutôt mourir que trahir » une maxime patriotique, Bécassine Labornez une héroïne nationale qui tourene en ridicule les Allemands ». (page 196)
Ainsi, la France a-t-elle fait un bond en avant dans l’intégration pleine des Bretons, mais dans le même temps, certains de ces derniers, jugeant que le prix de cette assimilation s’était faite à un prix très fort en s’appuyant sur des chiffres très gonflés de morts au champ d’honneur, vont avancer des désirs d’autonomisme, voire plus. Le drapeau breton ne date que de 1923, il a été conçu par un des membres fondateurs de l’Union de la jeunesse bretonne créée en 1918, un mouvement dont le journal connaît un premier numéro en janvier 1919.
En plus de la conclusion qui pose la question de l’entretien et l’utilisation de la mémoire du premier conflit mondial, on dispose d’une préface d’Alain Croix et d’un développement en six points :
1. Défendre la grande et la petite patrie : une mobilisation sans faille
2. Combattre
3. Tenir
4. Accueillir le monde en Bretagne
5. Faire face loin du front
6. Sortir de guerre et retrouver la Bretagne
7. Commémorer
8. Construire et utiliser une image
On voit que si le militaire armoricain s’est ouvert à d’autres, le civil breton n’a pas été de reste avec un fort accueil de Belges ou de gens du nord de la France, une présence importante des Américains car Saint-Nazaire est l’important lieu de débarquement de ceux-ci, la place importante prise par la main d’œuvre indochinoise et chinoise. L’iconographie est toujours de bonne taille (parfois pleine page) et variée: dessins d’enfants, peintures et dessins produits en direction des adultes, photographies, sculptures, monuments aux morts, pages de journaux ou de livres (en particulier des extraits de Bécassine qui fait son devoir patriotique dans quatre albums), vitraux, lettres de poilus illustrées partiellement, plans de tranchées, images de films, avis officiels… Un certain nombre de ces documents ont été présentés au château du musée de Nantes pour l’exposition « En guerres, 1914-1918/1939-1945, Nantes/ Saint-Nazaire » qui dure du 23 février 2013 au 23 février 2014. Il est à noter qu’elle est suivie d’une autre, « A l’école de la guerre », qui se tient du 25 janvier au 20 avril 2014; elle interroge sur le quotidien des petits Nantais pendant la Grande Guerre et on y verra des documents (en provenance en particulier des archives municipales) qui sont reproduits dans Les Bretons et la Grande Guerre.
https://www.ouest-france.fr/bretagne/montfort-sur-meu-35160/1918-1926-entrer-en-paix-l-expo-fait-le-plein-5964987