Avis de Alexandre : "Dix de der, belote et rebelote"
Comès a su utiliser une action se déroulant durant la Seconde Guerre mondiale pour rappeler la dureté de l’occupation allemande en Belgique durant la Première Guerre mondiale. À la mi-décembre 1944, une attaque surprise allemande, à laquelle on a donné le nom d’Offensive von Rundsted, débouchant sur la Bataille des Ardennes donne, pendant un mois et demi de grands espoirs à Hitler et aux collaborateurs français.
Les Américains avaient placé la 106th Infantry Division pour garder ce secteur alors que son expérience du feu était quasiment nulle et d’ailleurs elle fut presque totalement anéantie. Il s’agit d’un secteur proche de la rivière Our qui marque la frontière entre l’Allemagne et le Grand Duché de Luxembourg. La pénétration allemande en contre-offensive se fit avec un maximum de 40 kilomètres et Namur ainsi que Liège se retrouvèrent avec un front qui passait à environ vingt kilomètres.
L’auteur situe sa BD Dix de der dans les Ardennes belges où, au milieu de soldats américains quelque peu aguerris ramenés en hâte pour contenir la poussée des ennemis, un jeune soldat sans aucune expérience est surnommé en conséquence « le bleu ». L’album est une sorte de descente joyeuse aux enfers. Chargé de faire le guet, en s’enterrant dans un trou, il y rencontre tout d’abord les fantômes d’un civil belge menacé d’être fusillé en 1914 pour avoir protesté de manière trop véhémente contre la réquisition de son cheval de trait, puis d’un soldat prussien qui faisait partie du peloton d’exécution. Toutefois un obus venu des lignes françaises fit simultanément un triste sort à tous les deux. L’esprit d’un troisième personnage est présent, il s’agit de celui d’un instituteur anticlérical de son vivant et mort dans l’Entre-deux-guerres d’une cirrhose du foie ; il lui plaît aujourd’hui de se loger dans le crucifix en bois du calvaire. Ces trois personnages attendent un quatrième décès pour renouveler l’intérêt de leurs parties de belote. Toutefois ils prennent le bleu en sympathie comme deux oiseaux (réincarnation du curé et du sacristain du village) et essaient de lui épargner la mort. Ils y réussissent face aux tirs allemands qu’ils anticipent, par contre ils ne peuvent rien face à l’artillerie américaine qui en tirant trop court met fin à la vie du jeune héros.
Ce n’est pas la première fois que l’armée américaine tape à côté, puisque face aux fantômes des deux enfants rencontrés, l’esprit du civil belge avise qu’ils sont morts dans un bombardement américain commis il y a quelques semaines par erreur de leur village.
Voici un album d’apparence simple mais en fait le graphisme en noir et blanc porte magistralement la dimension ésotérique (marque de fabrique de toute l’œuvre de Comès) et les dialogues faussement naïfs et stéréotypés placent l’album dans un univers ironique, cynique et absurde. Le décalage entre l’univers du combattant et celui que la famille apparaît à travers un détail significatif, le jeune soldat américain reçoit, dans un colis de ses parents, un sapin miniature pour cadeau de Noël. L’ouverture se fait alors qu’il baigne dans l’univers des conifères de la forêt ardennaise. Par son dessin, ses décors et l’atmosphère unique de sa campagne ardennaise, Comès a mis en scène un univers fait d’un alliage de folie douce et de folie brute. Dans ce récit la première et la deuxième guerre mondiale sont étroitement imbriquées et cela nous rappelle le dessin de Will Dyson paru dans le Daily Mail du 17 mai 1919. Clemenceau, Lloyd George et le président Wilson quittent la conférence de la Paix et Will Dyson anticipe dans un coin, un enfant de six-sept ans appartenant à la classe 1940 qui pleure. C’est Clemenceau qui dit : « Curious! I seem to hear a child weeping! » (voir http://en.wikipedia.org/wiki/Will_Dyson ).
Les Américains avaient placé la 106th Infantry Division pour garder ce secteur alors que son expérience du feu était quasiment nulle et d’ailleurs elle fut presque totalement anéantie. Il s’agit d’un secteur proche de la rivière Our qui marque la frontière entre l’Allemagne et le Grand Duché de Luxembourg. La pénétration allemande en contre-offensive se fit avec un maximum de 40 kilomètres et Namur ainsi que Liège se retrouvèrent avec un front qui passait à environ vingt kilomètres.
L’auteur situe sa BD Dix de der dans les Ardennes belges où, au milieu de soldats américains quelque peu aguerris ramenés en hâte pour contenir la poussée des ennemis, un jeune soldat sans aucune expérience est surnommé en conséquence « le bleu ». L’album est une sorte de descente joyeuse aux enfers. Chargé de faire le guet, en s’enterrant dans un trou, il y rencontre tout d’abord les fantômes d’un civil belge menacé d’être fusillé en 1914 pour avoir protesté de manière trop véhémente contre la réquisition de son cheval de trait, puis d’un soldat prussien qui faisait partie du peloton d’exécution. Toutefois un obus venu des lignes françaises fit simultanément un triste sort à tous les deux. L’esprit d’un troisième personnage est présent, il s’agit de celui d’un instituteur anticlérical de son vivant et mort dans l’Entre-deux-guerres d’une cirrhose du foie ; il lui plaît aujourd’hui de se loger dans le crucifix en bois du calvaire. Ces trois personnages attendent un quatrième décès pour renouveler l’intérêt de leurs parties de belote. Toutefois ils prennent le bleu en sympathie comme deux oiseaux (réincarnation du curé et du sacristain du village) et essaient de lui épargner la mort. Ils y réussissent face aux tirs allemands qu’ils anticipent, par contre ils ne peuvent rien face à l’artillerie américaine qui en tirant trop court met fin à la vie du jeune héros.
Ce n’est pas la première fois que l’armée américaine tape à côté, puisque face aux fantômes des deux enfants rencontrés, l’esprit du civil belge avise qu’ils sont morts dans un bombardement américain commis il y a quelques semaines par erreur de leur village.
Voici un album d’apparence simple mais en fait le graphisme en noir et blanc porte magistralement la dimension ésotérique (marque de fabrique de toute l’œuvre de Comès) et les dialogues faussement naïfs et stéréotypés placent l’album dans un univers ironique, cynique et absurde. Le décalage entre l’univers du combattant et celui que la famille apparaît à travers un détail significatif, le jeune soldat américain reçoit, dans un colis de ses parents, un sapin miniature pour cadeau de Noël. L’ouverture se fait alors qu’il baigne dans l’univers des conifères de la forêt ardennaise. Par son dessin, ses décors et l’atmosphère unique de sa campagne ardennaise, Comès a mis en scène un univers fait d’un alliage de folie douce et de folie brute. Dans ce récit la première et la deuxième guerre mondiale sont étroitement imbriquées et cela nous rappelle le dessin de Will Dyson paru dans le Daily Mail du 17 mai 1919. Clemenceau, Lloyd George et le président Wilson quittent la conférence de la Paix et Will Dyson anticipe dans un coin, un enfant de six-sept ans appartenant à la classe 1940 qui pleure. C’est Clemenceau qui dit : « Curious! I seem to hear a child weeping! » (voir http://en.wikipedia.org/wiki/Will_Dyson ).
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