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Jean-Baptiste Marcaggi

Jean-Baptiste Marcaggi
CPE 157 pages
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Avis de Adam Craponne : "Rois du maquis"

Jean-Baptiste Marcaggi est né en 1866 à Bocognano et mort en1933 à Ajaccio,  il a été directeur de la Bibliothèque d'Ajaccio de 1897 à 1910 puis de 1921 à 1933 mais aussi historien, romancier, journaliste. Bandits corses d'hier et d'aujourd'hui est le dernier ouvrage de lui à paraître, cela un an avant sa mort.

Bocognano est aujourd’hui situé dans le Parc naturel régional corse et si le village est lui-même à environ 500 m il est entouré par des massifs qui atteignent souvent plus de 2 000m. En 1794 Napoléon Bonaparte, dans ce village de ses aïeux, manqua de peu de perdre la vie des mains des partisans de Paoli.

Le plus célèbre des bandits d'honneur corses est justement François Antoine Bonelli (dit Antoine Bellacoscia) né à Bocognano et il est resté dans le maquis plus de quarante ans, se rendant finalement en 1892 après que des élus corses aient négocié auprès du président de la République Sadi Carnot une grâce. Notre auteur, lorsqu'il étrait enfant, l'a très vraisemblablement rencontré dans le maquis.

Cette illustration, de la reddition du bandit Antoine Bellacoscia, n'est pas dans l'ouvrage

Jean-Baptiste Marcaggi commence par évoquer l’histoire de la vendetta en Corse et rappelle les méthodes radicales employées pour lutter contre son usage à l’époque où Pascal Paoli essayait d’imposer une république corse en 1768-1769. L’auteur passe en revue les mesures (directes ou indirectes) prises par les régimes successifs pour lutter contre l’extension du banditisme dans l’île de beauté. Il rappelle que la visite au bandit dans le maquis devient pour des personnalités un gage d’un voyage réussi en Corse. Les malfaiteurs en question l’acceptent car cela vient renforcer leur aura.

Certains mettent des villages en coupe et en particulier dans les années 1930 ils n’hésitent pas à tuer des gendarmes. En 1931 est décidé en conseil des ministres une opération qui mobilise 640 gardes mobiles arrivés du continent aux côtés d’une gendarmerie qui avait été renforcée dans les mois précédents. Cela donne des résultats quoique Jean-Baptiste Marcaggi écrive qu’à la date d’octobre 1932 André Spada et Bornea restent insaisissables. André Spada va se voir consacré un chapitre et on reviendra à lui à cette occasion.  François Bornea est évoqué dans le chapitre intitulé  "Joseph Bartoli et Cie".

Avant d’attaquer des portraits quasi individuels de bandits corses, Jean-Baptiste Marcaggi développe une longue réflexion sur la psychologie de la vendetta et du bandit corse. Ceci est l’occasion d’évoquer en particulier Rocchini exécuté à Sartène en 1888, à la suite d’une histoire de meurtre de chien il tue un voisin en 1883 et sombre dans une folie meurtrière à l’encontre d’autres membres de la famille du premier assassiné, d’une jeune fille qu’il voulait violer et de gendarmes. L’auteur évoque les talismans que portent les gens ayant pris le maquis et rapporte les propos de Félix Micaelli  qui a un régime spartiate, n’exerce aucune violence envers la population locale et a toujours tous ses sens aux aguets.

L’auteur consacre un chapitre entier à ce personnage qui avait livré son autobiographie en 1927. En fin de compte c’est son cousin qui l’entraîna sur la route du maquis en étant d’abord complice de l’enlèvement d’une jeune fille que le premier voulait épouser et ensuite par sa participation au meurtre de personnes qui avaient témoigné contre le père de son cousin, ce qui avait conduit ce dernier à la guillotine. Félix Micaelli  collabora même avec les gendarmes pour mettre fin aux agissements de dangereux bandits dont certains étaient des réfractaires à la mobilisation durant la Grande Guerre. Il termina sa vie soit au maquis soit sous une fausse identité dans un village corse.

Jean-Baptiste Marcaggi  revient donc sur François Bornea, ancien gendarme, qui rackette en compagnie de Joseph Bartoli ; il est devenu malfaiteur depuis 1928 et tue deux gendarmes en 1931, quelques mois plus tard son cadavre est découvert criblé de balles. Joseph Bartoli tire trois jours différents de 1927 sur un employé d’un service de bus concurrent au sien mais fournit à chaque fois des alibis. L’année suivante, il tue son associé qui lui avait mal parlé.

Il se lie à Perfettini ancien proxénète marseillais qui a quitté la Cannebière après avoir tué deux personnes sous l’emprise de l’alcool. Perfettini commet des meurtres horribles et est tué par un de ses cousins, un gendarme de la prévôté de Syrie venu passer des congés en Corse.  Entre temps Joseph Bartoli  a assuré l’élection comme sénateur de Corse, par pression sur les grands électeurs, d’un industriel vosgien Paul Lederlin. Jean Simonetti, un exploitant forestier racketté par Bartoli, tend un piège à ce dernier et en novembre 1931 le tue ou le fait assassiner.

«Des mains pieuses envelop­pèrent le cadavre de Bartoli dans des draps fins. Les obsèques se firent dans un silence lugubre. Il n’y eut qu’un petit groupe de parents pour suivre le convoi. Les habitants de la commune se tenaient sur une prudente réserve. Le corps expédition­naire envoyé en Corse pour la répression du ban­ditisme, avait, en effet sur ces entrefaites, débarqué à Ajaccio et une colonne de gardes mobiles ve­nait d’occuper brutalement, militairement Palneca! Pendant deux ans, Bartoli avait régné en dictateur dans les cantons de Sainte-Marie et de Zicavo, qu’il considérait comme son fief. De son omnipotence, il ne restait qu’un souvenir de honte, d’opprobre pour la fierté corse!». (page 118)

On apprend donc par ailleurs André Spada prit le maquis en 1922, après avoir tiré sur des gendarmes puis tué son ancienne maîtresse, il va continuer en terrorisant  certains villages et ce que ne dit pas l’ouvrage c’est que  fin mai 1933 il est arrêté et est guillotiné le  21 juin 1935 devant la prison de Bastia. Les autres faits évoqués concernent Crébasali et deux membres de la famille Lisandri  à Chidazzo en 1873 et les bandits corses suivants : Jean-Camille Nicolaï, François Bocagno, Matteo Poli, Castelli, Romanetti, François Caviglioli.

Notons un joli essai de Jean-Baptiste Marcaggi autour du Colomba de Prosper Mérimée pages 32 à 48, sujet qui se termine en disant que suite à la vendetta, dont s’inspirait l’auteur, on ne vit plus pendant treize ans ouvertes les fenêtres d’une maison de Sartène pourtant habitée. Les illustrations sont nombreuses et on a ainsi le portrait de presque tous les personnages évoqués.

Pour tous publics Beaucoup d'illustrations

Adam Craponne

Note globale :

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