Avis de Patricia : "Vivre d’amour et pas des fruits de cet amour"
Cet ouvrage est paru en 2016 en Allemagne et au Royaume-Uni, il a connu une première édition en français en 2019. Il est le fruit d’une enquête menée en Israël auprès de vingt-trois femmes juives entre 2010 et 2013. Aucune n’était devenue mère à l’adolescence ou était mère célibataire à la naissance de leur enfant.
Dans les sociétés occidentalisées, le nombre de naissances ne cesse de diminuer, et en Allemagne on sait que la chancelière Merkel avouait avoir fait le choix de ne pas avoir d’enfant. Le poids sociétal fait toutefois que peu de femmes envisagent de dire qu’elles ne souhaitent pas ou regrettent d’être mères. C’est pourquoi le contenu de ces entretiens est précieux car il permet d’approcher comment se manifestent et se vivent certaines contraintes sociétales.
On perçoit aussi parfois le gouffre entre le discours idéalisé sur la maternité et la parentalité et l’univers vécu avec un poids bien pesant de responsabilités, de contraintes et de renoncements qui s’imposent aux personnes interrogées ici. On a d’ailleurs le témoignage page 148 d’une femme qui a accepté le divorce que parce que son mari entendait garder les enfants et qu’elle se contenterait d’un droit de visite.
Ces mères ne rejettent pas pour autant leur enfant, il est vrai qu’ont été écartées de l’interview les femmes qui, dans un questionnaire, avaient répond non à ces deux interrogations : «Si vous pouviez revenir en arrière, avec les connaissances et l’expérience qui sont les vôtres aujourd’hui, voudriez-vous toujours avoir des enfants?» et «Selon vous, y a-t-il des avantages à devenir mère?». La sociologue pointe que si un homme abandonne ses enfants il sera critiqué alors qu’une femme qui fait de même sera stigmatisée car elle est garante d’un ordre social. Ajoutons personnellement qu’un enfant abandonnée par sa mère est, d’après nos expériences, largement traumatisé. Une des raisons étant certainement qu’il se sent coupable de cet abandon.
On retiendra en particulier ces phrases :
« Les efforts que je fais me vident, m’épuisent. Je n’ai plus le temps pour rien d’autre. Avant, j’aimais passer du temps à écrire, à faire de la sculpture ou du dessin. J’adorais créer. Maintenant, je n’ai plus aucune inspiration, ni aucune force.»
« Quand je suis devenue mère, j’ai soudain pris conscience qu’il fallait être féministe. Une femme, une fois qu’elle a un enfant, renonce à beaucoup de choses auxquelles un homme n’a pas à renoncer. Elle devrait en tenir compte lorsqu’elle prend la décision. Le système culturel dans lequel on vit nous piétine.»
Pour tous publics Aucune illustration