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La religion dans les établissements de santé

La religion dans les établissements de santé
Les Études hospitalières 389 pages
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Avis de Benjamin : "L’acte de soins au prisme du religieux et de la laïcité"

Les soignants ne sont pas des anthropologues et sont bien incapables en général (à l’exception du soignant de même origine que tel malade) d'évaluer si les exigences du patient relèvent effectivement de la religion, de la culture, ou tout simplement de la personne. L’Observatoire de la laïcité a publié, il y a quelques années, Laïcité et gestion des faits religieux dans les établissements publics de santé (consultable ici).

La religion dans les établissements de santé rassemble diverses contributions. Cet ouvrage réunit des auteurs venus de départements de droit d’université ou du CNRS. Il est dirigé par François Vialla  et  Vincente Fortier.

Cette dernière est directrice de recherche au CNRS et directrice de l'UMR « Droit, Religion, Entreprise et Société » (Université de Strasbourg/CNRS) et elle a constitué, autour des enjeux de la circoncision rituelle, un groupe de réflexion international et interdisciplinaire, afin d’explorer dans toutes ses dimensions et ses implications cette pratique que l’on peut qualifier de chirurgicale.

Aussi ne sera-t-on pas surpris que l’une de ses communications s’intitule  "Circoncision/excision : des atteintes à l’intégrité du corps humain".  Selon la loi française, la circoncision est assimilable  relève de violences ayant entraîné une mutilation qui peut entraîner une peine de dix ans d’emprisonnement. Cependant elle n’est pas poursuivie. Les parents choisissant l’orientation religieuse de leur enfant, ils s’autorisent à soumettre ce dernier à des obligations liés à un culte. Un malheureux cas où un enfant tomba dans le coma durant un an (avant qu’il ne décède) entraîna un procès de la mère à l’encontre de l’hôpital. Le Conseil d’État rappela que la circoncision à motif religieux n’était pas un acte thérapeutique par définition mais que la responsabilité du service public est tout de même engagée.

L’excision est par contre un acte hors-la-loi qui est pratiqué dans certaines familles musulmanes, sans que la moindre allusion en soit faire dans le Coran. Au tout début du XXIe siècle, on estimait le nombre de personnes excisées en France à près de 55 000 femmes. On pense que cette pratique est en net recul sur des fillettes nées dans l’hexagone. Plusieurs affaires d’excision furent médiatisées entre 1990 et 2010. La connaissance de sa répression et de ses conséquences peut la faire diminuée mais cela s’avère difficile auprès d’une population qui conçoit cette action comme un rite. Deux faits sont rapportés, le premier est la déchéance de la nationalité d’un père ayant fait exciser sa fille et le second est que la reconstitution du clitoris est pris en charge par la sécurité sociale.   

Son autre texte est intitulé  "La neutralité revisitée" ; elle distingue ici la neutralité protection (neutralité du soignant, présence d’aumôneries, prise en charge des interdits alimentaires souhaitée mais non imposée de la neutralité contrainte (exercice de sa religion par le patient, récusation d’un soignant, interdiction du prosélytisme).  

François Vialla  est professeur en droit privé, spécialisé en droit médical et de la santé, en droit de la bioéthique et en éthique biomédicale. Il est fondateur du Centre Européen d'Études et de Recherche Droit et Santé basée à Montpellier , où l’université propose un master "Droit et gouvernance des établissements de santé". Il a ici présenté trois textes.

Le premier est "Le libre-exercice du culte dans les établissements publics de santé". On relèvera là les recommandations, spécifiques aux EHPAD, de l'Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux  ANESM (un organisme créé en 2007 grâce à la loi de financement de la sécurité sociale, comme branche de la HAS). Il s’agit de respecter tous les objets et rites religieux dans l’espace privatif ainsi que les régimes alimentaires. Il est aussi recommandé de faciliter l’accès aux lieux et ministres du culte et enfin d’avoir, dans l’EHPAD, une personne ressource pour chacune des principales religions.

François Vialla  donne également un texte autour de la récusation d’un soignant d’un autre sexe. Le principe est que le patient a le libre choix  de son médecin, toutefois ce dernier doit assumer les conséquences de son refus de l’unique praticien disponible comme les tribunaux l’ont affirmé.

La dernière communication de François Vialla  touche le refus de soin, celles touchant notamment les refus d’alimentation pendant une période de jeûne rituel et la question de la transfusion sanguine pour les Témoins de Jéhovah. Le respect de la volonté de la personne (pouvant être d’ailleurs un parent) doit être mis en regard de l’obligation générale de sauver la vie du patient. Le Conseil d’État en 2001, souligne que la volonté du patient prime sur la préservation de la vie mais que les médecins ne commettent pas de faute s’ils commettent un acte destiné à la sauvegarde de la personne. Un jugement que certains pourraient qualifier de mi-chèvre mi-chou. Pour le cas d’un enfant, le Code de la Santé prescrit l’autorité du médecin sur celle des parents.

Éric Martinez, dans "Prolégomènes" rappelle l’existence des textes qui gouvernent le principe de laïcité à l’hôpital et annonce un certain nombre de questionnements qui trouveront, dans cet ouvrage, un développement. Il évoque le fait que des revendications (aux sources présentées comme religieuses) naissent d’une position à un biopouvoir dont la philosophie est passée, en France, de l’Église à l’État.

Les autres textes sont d’Hubert Peres pour    "Un étrange objet du débat : La Laîcité à l’hôpital dans les discours publics (2003-2011), d’Éric Martinent pour "Les aumôneries et la présence spirituelle dans les hôpitaux et les établissements publics de santé", de Lucile Lambert-Garrel avec "L’influence de la religion sur l’assistance médicale à la procréation" (un panorama est fait là des positions du judaïsme, catholicisme, protestantisme, orthodoxie et islam autour de cette question mais l’auteure dresse également les normes juridiques en la matière dans l’hexagone) et enfin de Guillaume Rousset sur "La clause de conscience dans le domaine de la santé, une notion à la croisée des chemins".

Pour connaisseurs Peu d'illustrations

Benjamin

Note globale :

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