Avis de Patricia : "Je le pansay, Dieu le guarist (Ambroise Paré)"
Nombre de saints furent médecins, tels à Kiev, Agapit l’Anargyre qui aurait eu le don de guérir les malades simplement avec des herbes bouillies ainsi que par la force de ses prières et les saints anargyres Cyr et Jean à Menoutis en Égypte. Par ailleurs Luc, auteur du Troisième Évangile et des "Actes des Apôtres ", était médecin à Antioche. Thomas de Gabory, l’auteur de Tu étais malade et je t’ai visité : Médecine, guérison et salut, est à la fois dominicain, prêtre et docteur ; il a œuvré dans divers pays dont les Philippines, l’Inde et Haïti. Il est né le 2 janvier 1977 à Bordeaux et il a été postulateur (personne chargée d’évaluer la dévotion chrétienne d’une personne pouvant devenir sainte) de Darwin Ramos, enfant myopathe des rues de Manille.
Le titre de l’ouvrage est inspiré d’une phrase de l’évangile de saint Mathieu. De l’introduction, on retiendra :
« Hippocrate fait de la médecine le premier des arts. Les dictionnaires sont partagés, ils classent la médecine parfois dans les sciences, parfois dans les arts. Certains n’osent pas trancher et la définissent comme les deux à la fois. Cette hésitation vient du fait que le mot "technique" dérive du mot "teknè" qui se traduit par "ars" en latin d’où vient le mot "art" en français. La "teknè" désigne donc l’art de faire d’une certaine manière ou de produire selon une certaine méthode – dans les règles de l’art. La médecine est un art, une pratique de soins, mais un art très particulier car les professionnels de santé ne fabriquent rien » (page 14).
« Le salut est l’état de la personne sauvée par Dieu. L’être humain a besoin de Dieu pour être sauvé de la mort et du péché. Le salut comprend deux dimensions : une guérison et une élévation. (…) L’être humain sauvé est élevé au rang de fils de Dieu ; il est rendu participant de sa nature divine ce qui le fait entrer dans la vie éternelle » (pages 15-16).
« L’objectif de ce livre est de montrer les liens qui unissent la mission de la médecine, qui est de prendre soin de l’être humain souffrant, avec la guérison et le salut, ainsi que leur mouvement d’articulation » (page 17).
Dans le premier chapitre, il est rappelé que pour les Hébreux la maladie est considérée comme un châtiment de Dieu. Mal physique et mal moral sont confondus, expulser le démon au sein du corps malade peut apparaître comme un objectif. Les médecins entrent ainsi en concurrence avec Dieu. Ben Sira est un érudit juif qui écrivit au IIe siècle avant J.-C., avec son ouvrage Le Siracide on découvre une évolution des mentalités, les docteurs coopérant avec Dieu. On peut en effet lire là :
« Rends au médecin pour tes besoins les honneurs qui lui sont dus;
car, lui aussi, c'est le Seigneur qui l'a créé.
C'est du Très-Haut, en effet, que vient la guérison,
et du roi lui-même il reçoit des présents.
La science du médecin élève sa tête,
et il est admiré en présence des grands.
Le Seigneur fait produire à la terre ses médicaments,
et l'homme sensé ne les dédaigne pas. »
Le deuxième chapitre s’intitule "Jésus et la Médecine". On y expose les miracles médicaux du Christ, et on redécouvre des personnages de l’entourage de Jésus réalisant des actions de soin. « Toutes les guérisons sont intimement liés au salut parce que Jésus est à la fois guérisseur et sauveur » (page 75). « Jésus est médecin des corps quand il guérit et médecin de l’âme quand il sauve » (page 79). Le Sauveur appelle à prendre soin de son prochain.
Le sujet suivant traite de la vocation médicale. L’auteur écrit : « Car il n’y a pas de bonne médecine sans une certaine humanité et une attention du cœur. Or celles-ci ne sont ni objectives, ni mesurables » (page 109). Le dernier chapitre évoque les liens entre soin, guérison et salut. Thomas de Gabory commence par dire que tout homme recherche le bonheur, et lie ce dernier au salut. En conséquence le désir de bonheur passant par un souhait d’être en bonne santé, la guérison est une étape vers le salut. La personne souffrante a besoin autant de médicament que d’écoute car son rapport au monde est souvent affecté.
La compassion est une réponse à la souffrance de l’autre. L’accompagnement du malade prend des formes diverses. « Le care est le moyen de pallier la douleur, l’inquiétude ou l’affection chez l’autre (…) Le care est souvent opposé au cure qui signifie le "soin curatif" ou le "soin pour guérir". Les soins curatifs qui visent la guérison sont eux-mêmes généralement opposés aux soins palliatifs qui visent l’apaisement des douleurs et de la souffrance. En réalité, il n’y a pas lieu de les opposer, car le care englobe le cure, et les soins palliatifs ne sont qu’un aspect du care. Le care englobe le cure car la guérison est le meilleur moyen pour apaiser les douleurs et la souffrance (page 125). Pour l’auteur les soins palliatifs, visent de manière globale l’apaisement de la douleur, donc ne concernent pas que la fin de vie. Les soins peuvent déboucher sur une guérison, toutefois dans certains cas on ne traite que les symptômes et ce sont les défenses naturelles qui gagnent sur l’infection, comme pour le rhume (page 127). Le corps guéri ne ramène pas le physique et le moral du patient ne retournant pas à l’état initial d’avant la maladie. Toute maladie laisse des traces (page 129). Les soignants ne procurent pas le salut mais les gestes de soin s’inscrivent dans un amour de charité reçu par Dieu (page 134). « L’espoir de la guérison et de la santé manifestent toujours l’espérance du salut et du bonheur » (page 138).
Dans la conclusion, on contextualise le célèbre « Je le pansay, Dieu le guarist » d’Ambroise Paré, au demeurant fervent protestant. L’auteur écrit que le soignant est touché par la détresse humaine du malade, notre opinion personnelle est qu’on le souhaiterait mais plusieurs péchés connus semblent empêcher certains gens de l’univers médical d’être vraiment sensibles à la souffrance de leur patient.
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