Avis de Patricia : "L'anticléricalisme, c'est pour la France, Monseigneur, mais ce n'est pas un article d'exportation (Gambetta au cardinal Lavigerie)"
L’ouvrage est sous-titré Stratégies missionnaires et mutations d’une société traditionnelle (1840-1915). Il s’agit là d’une version allégée et vulgarisatrice d’une thèse soutenue par l’auteure en 2017 à l’EHESS. L’objet est d’approcher, à travers le cas de la population arménienne la plus conséquente en nombre parmi les peuples christianisés de l’empire ottoman, les évolutions sociales et culturelles des minorités chrétiennes soumises à l’autorité du sultan. L’aborder à travers le prisme des filles permet de visiter une dimension peu connue.
Le rôle de précurseur de la scolarisation des filles dans l’empire ottoman est tenu par des missionnaires protestants américains. Les congréganistes catholiques d’origine française sont actifs auprès des chrétiens orientaux présents depuis des siècles. Ils entendent bien garder leur influence sur la population de tradition chrétienne du Proche-Orient et ne pas se laisser déposséder de celle-ci sur de futures mères.
Pour cela, ils recrutent des religieuses issues de milieux modestes. Les écoles sont ouvertes à des enfants de toute origine ethnique ou religieuse toutefois les ressortissants uniates sont nombreux en proportion à confier leur progéniture aux écoles catholiques.
Le cadre chronologique choisi démarre en 1840 et se clôt en 1915, la période où l’empire ottoman est agité par des mouvements nationaux (l’indépendance de la Grèce est obtenue en 1829, d’autres pays sont créée en s’échappant de l’univers de la Sublime Porte) auxquels répondent quelques tentatives de réforme afin de moderniser l’administration de l’empire. On sait que 1915 est l’année de décision de la mise en œuvre d’un génocide à l’encontre des Arméniens.
Les religieuses actives dans l’Empire ottoman appartiennent aux ordres suivants : Dames de Sion, Franciscaines de Lons-le-Saunier, Oblates de l’Assomption, Sœurs de Saint-Joseph de l’Apparition, Sœurs de Saint-Joseph de Lyon. Elles ne sont pas actives que dans les villes mais également très présentes dans l’Anatolie orientale rurale. L’ouvrage, doté d’une illustration assez abondante, est composé de cinq parties. Ces dernières se nomment : À l’aube du XIXe siècle, les Arméniens dans l’empire ottoman, L’Arménie terre de mission, L’installation des missions enseignantes en Anatolie, Des Arméniennes à l’école de la France et du catholicisme, Vers la destruction d’un peuple et d’une œuvre. Les documents qui servent à construire le récit sont souvent tirés d’archives et de témoignages.
Les annexes ont un contenu varié et les notices biographies consacrées à des religieuses sont le point phare de cette partie. On trouve ici des religieuses nées dans l’hexagone, avec pour une bonne part d’entre elles une origine dans les trois départements francs-comtois de l’époque (le Territoire de Belfort est évidemment exclu de l’univers franc-comtois à cette époque). Par ailleurs le lecteur découvre le parcours de vie de sœurs nées dans divers espaces de l’empire ottoman ayant des traditions chrétiennes (comme évidemment le Liban).
Pour connaisseurs Quelques illustrations