Avis de Benjamin : "La loi protège la foi à condition que la foi ne veuille pas faire la loi (Aristide Briand en 1905)"
Jean-Louis Auduc est agrégé d'histoire. Il a été notamment directeur-adjoint de l'IUFM de Créteil puis chargé de mission sur les problèmes de violence scolaire auprès du ministre délégué à l'Enseignement professionnel (à savoir Jean-Luc Mélenchon). Il est membre du Comité laïcité république formé en février 1991, à l’initiative du Grand Orient.
Cette association alerte sur des manquements au respect de la loi de séparation des églises et de l’État de 1905 ou autour de ce qui heurte sa propre conception de la laïcité. Elle plaide au respect strict du contenu de la loi de séparation de 1905 et s’oppose au communautarisme politique et aux revendications identitaires tout en dénonçant toute forme de racisme ou de discrimination. La préface est assurée par un DDEN (délégué Délégué départemental de l'Éducation nationale), il se nomme Eddy Khaldi, lui-même auteur d’ouvrages autour de la laïcité.
Jean-Louis Auduc propose dans cet ouvrage un contenu tout à fait dans les orientations du Comité laïcité république. Une dizaine de dessins de presse agrémentent le texte, ils sont signés d’Alf un artiste qui a toujours eu à cœur d’illustrer ce thème (voir http://www.alf-dessin-caricature.com/laiumlciteacute.html ).
On peut regretter l’absence de tables des matières pour cet ouvrage, aussi nous donnerons le nom des chapitres successifs : Éviter la confusion des espaces définis par la laïcité, Les avantages d’une République laïque, Le colonialisme français agent historique du communautarisme religieux, Bien séparer le culturel du cultuel: la protection des monuments historiques, Connaître les religions, leurs fondements, leurs pratiques est indispensable pour la culture générale de tous, Une histoire de la laïcité à l’école, au collège et au lycée plus complexe qu’il n’y paraît, Derrière certains discours qui se disent laïques, le spectre du racisme, Quelques incohérences françaises qui semblent légitimer le fait qu’il y a deux poids, deux mesures, suivant les religions concernées.
L’auteur prend position pour le maintien et le développement des langues régionales, motif d’enracinement et non de communautarisme. Il rappelle que, pour Aristide Briand, la tenue vestimentaire n’intéresse pas les autorités sauf s’il y a menace à l’ordre public. En général Jean-Louis Auduc rapporte simplement des faits (tout en expliquant ce qui a conduit à une décision particulière) ainsi il souligne que les prières collectives dans l’espace public ne sont pas illégales en soi. Jean-Louis Auduc pointe d’ailleurs que certains, avançant que les musulmans n’ont pas le droit de prier dans la rue, avaient participé à des défilés de la Manif pour tous, des manifestations accompagnées de prières de rues catholiques nombreuses.
La notion d’usage local, issu d’une tradition, permet d’autoriser temporairement les crèches dans l’espace public pour les départements de l’ouest de la France mais il est posé un interdit dans d’autres espaces géographiques. Au sujet des tenues vestimentaires, il cite nombre d’exemples variés où on a pu voir que se posait la question de compatibilité de l’habit d’un employé avec son activité professionnelle. On aurait aimé que l’auteur évoque ici l’usage du burkini dans les piscines grenobloises, on pense que son sentiment est conforme à celui du Comité laïcité république, à savoir une opposition à ce port, car « ce vêtement est le symbole d’un statut juridique inférieur pour les femmes, partout dans le monde » (voir https://www.laicite-republique.org/a-grenoble-le-deuil-de-l-emancipation-des-femmes-clr-17-mai-22.html). Plus loin, l’auteur mentionne qu’Elisabeth Badinter a dénoncé fort à propos le 25 juin 2022, cette fois au sujet de l’interdiction (ou limitation drastique) nouvelle de l’avortement « les pays qui sont religieux sont un danger pour les libertés féminines ».
Jean-Louis Auduc développe largement autour des aumôneries dans les armées. Il évoque également les aumôneries dans les lycées et collèges, cependant il le fait sans soulever le problème que le ministre Monory en 1988 a laissé ouverte la possibilité d’en créer dans des établissements sans internat alors que ces mêmes aumôneries ne se justifiaient en fait à l’origine que par l’existence d’élèves internes. Depuis la loi du 15 mars 2004, il est malaisé selon nous d’expliquer que le port du foulard est interdit dans des établissements d’enseignement où on peut rencontrer des aumôniers en soutane (facultative depuis 1962, elle a été reprise, ces dernières années, par un nombre non négligeable de prêtres strictement fidèles ou non aux consignes du pape). Jean-Louis Auduc éclaire certaines motivations dans la création de l’hôpital franco-musulman de Bobigny (appelé aujourd’hui par le nom d’Avicenne), il y avait là, à la marge, un désir de surveillance policière de population issue des colonies.
Pour tous publics Quelques illustrations