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La droite et la laïcité, histoire d’une imposture

La droite et la laïcité, histoire d’une imposture
Dominique Avril32 pages
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Avis de Benjamin : "Il n’est pas concevable de voir utiliser à des fins qui sont l’inverse des finalités que lui avaient assignées ses concepteurs, le principe émancipateur de la laïcité (Jean-Michel Ducomte)"

L’auteur avait déjà donné deux articles intitulés "Les écoles publiques à Rezé avant la séparation de l’Église et de l’École à Rezé" et "Les premiers instituteurs publics à Rezé" dans deux numéros différents de la revue L’Ami de Rezé. Dominique Avril est directeur d’une école élémentaire dans cette dernière commune de la banlieue nantaise.

 

Cet ouvrage a le grand mérite de présenter les étapes du mouvement qui vit les habituels défenseurs de l’école privée se faire les censeurs de la laïcité non seulement pour l’école mais pour nombre de sujets sociétaux. L’auteur avance, comme d’autres, que la récupération de la laïcité par la droite est née dans les prolongements du rapport Pour une nouvelle laïcité de François Baroin. Ce dernier, maire de Troyes depuis 1995, est d’ailleurs le fils de Michel Baroin ancien grand-maître du Grand Orient de France. Celui-ci n’en confia pas moins la scolarité de François Baroin au collège Stanislas où François se fait pour ami Jean-Michel Blanquer. 

 

Dans ce rapport, remis en juin 2003, on peut lire : « [La laïcité] est devenue un élément de référence de l'identité française. Sa remise en cause par le multiculturalisme et le communautarisme peut donc être perçue comme une menace pour l'identité nationale. Dès lors un renouveau de la laïcité devient un élément de la réponse au choc du 21 avril 2002. On assiste ainsi à une re-politisation du thème de la laïcité qui pourrait devenir une valeur de la "droite de mai" face à une gauche qui s'est largement convertie au multiculturalisme et n'a pas su répondre au défi du communautarisme ». 

 

Le président de l’Assemblée nationale Jean-Louis Debré prend l’initiative de constituer une mission d’information sur la question du port des signes religieux à l’école, il en est le rapporteur et François Baroin en est membre comme d’ailleurs pour l’opposition par exemple Élisabeth Guigou ou Jean Glavany (voir https://www.assemblee-nationale.fr/12/rapports/r1275-t1.asp et https://www.assemblee-nationale.fr/12/rapports/r1275-t2.asp#TopOfPage). En prolongement de ce texte remis en décembre 2003 une commission de réflexion sur l'application du principe de la laïcité dans la République est créée par le président Jacques Chirac et confiée à Bernard Stasi.  Vingt membres issus de divers horizons la composent (enseignants, chercheurs, juristes, politiques, responsables d'établissements scolaires...).  Elle auditionne près de cent cinquante personnes représentant la société civile, les partis politiques et les instances religieuses du pays.

 

Dominique Avril écrit : « François Baroin prête un pouvoir thaumaturgique à la laïcité. Elle permet pêle-mêle de s’opposer au communautarisme, à l’islamisme et au consumérisme. Elle est aussi une réponse à la mondialisation. Elle pourra redonner confiance aux jeunes de quartier dans les valeurs d’effort et de culture.  De même, la restauration d’un projet laïque permettra de lutter contre la fracture démocratique, contre l’exclusion. C’est, enfin, un outil de combat contre la gauche et, on peut l’imaginer, même s’il ne l’écrit pas, aussi contre le front national ». Pour notre auteur, la nouvelle laïcité qui s’est reconstruite de façon stigmatisante et dévoyée particulièrement vis-à-vis de l’islam devenant ainsi une police de la pensée et une obligation laïque. Marine Le Pen a par la suite enfourché le même cheval, alors que son mouvement se fait le chantre de l’enseignement privée, comme certains  ont pu le voir récemment lors des débats autour du Rapport parlementaire sur l'enseignement privé catholique rendu par Paul Vannier et Christopher Weissberg.

 

La pensée de Dominique Avril rejoint celle de Philippe Portier, qui dans un article intitulé "Le tournant substantialiste de la laïcité française" paru dans Horizontes Antropológicos, (n°52, 2018, pages 36) écrivait: «Les gouvernements, de droite mais aussi de gauche (…), en ont fait un instrument de reconfiguration de l’esprit public: elle s’agence désormais en un dispositif de diffusion de la valeur, au service d’une politique du bien, et non point comme hier d’une politique du juste. C’est là le paradoxe de ce perfectionnisme libéral: il attente à la liberté religieuse, qui fait fond originellement sur la reconnaissance de l’autonomie de la personne, au nom du principe même d’autonomie ».

 

Notre auteur pose la question des limites d’expression ne touchant que l’enseignement public. « Si le port de signes manifestant une appartenance religieuse ne permet pas dans les écoles publiques le bon fonctionnement de l’École, le respect des valeurs républicaines et le pluralisme des convictions, comment le permet-il dans les écoles privées ? ». On ouvre la porte à deux phénomènes : le premier est l’ouverture d’écoles privées musulmanes et le second est l’inscription d’élèves musulmans dans des établissements catholiques. L’auteur le signale, pour les deux situations, dans un quartier nord de Marseille. Ajoutons que les élèves sikhs sont condamnés à une solarisation dans le privé, vu leur obligation de port d’un turban autour de leurs cheveux. Suite à la loi de 2004  sur les signes religieux à l’école publique, il y a eu création d’un lycée sikh à Bobigny. Les dispositions actuelles renforcent paradoxalement le communautarisme alors que le message officiel est plutôt de vouloir le combattre. Par ailleurs il y a 300 établissements privés juifs en France dont 130 sous contrat avec l'Etat.

 

Notons personnellement que les établissements privés sous contrat d'association ont le droit d’introduire, dans  leur règlement intérieur, une clause interdisant le port du voile. Selon la Cour de cassation, en interdisant le port du voile, il n'y a pas d'atteinte ni à  la liberté de conscience évoquée dans la loi Debré ni à l'obligation de l'établissement privé sous contrat d'accueillir tous les enfants sans distinction d'origine. Cette liberté fondamentale concerne la liberté de la pensée et non l'expression de celle-ci.  On se procurera l’ouvrage en contactant do.minus@live.fr

 

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Benjamin

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