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Pour la laïcité, pour la République ! Rapport 2023-2024

Pour la laïcité, pour la République ! Rapport 2023-2024
Conform175 pages
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Avis de Benjamin : "Ce qui fait de nous des laïques n'est pas la séparation du temporel et du spirituel, c'est la séparation du spirituel et du religieux (Alain Finkielkraut)"

Le coordonnateur de cet ouvrage a été Charles Carambou (magistrat financier honoraire) de l’Union des familles laïques (association ayant pour conseillère scientifique Catherine Kintzler). Le Collectif laïque national a été fondé en 2011, à côté de plusieurs obédiences maçonniques et deux associations de libres penseurs (mais pas la Libre Pensée),  il compte une bonne vingtaine d’associations certaines nationales dont la Fédération Nationale des Délégués Départementaux de l'Education Nationale (D.D.E.N.), le Comité-Laïcité-République (Michel Seelig de ce mouvement est un des rédacteurs), la LICRA, la Confédération Nationale des Associations Familiales Laïques (C.N.A.F.A.L.), EGALE - Égalité, Laïcité, Europe (présidée par l’ancienne sénatrice radicale de gauche puis Mouvement radical Françoise Laborde). Certaines sont locales comme le Comité de réflexion et d'action laïque - CREAL76,  Observatoire de la Laïcité de Provence,  Observatoire de la Laïcité de Saint-Denis, Laïcité 18 ou Comité 1905 Auvergne-Rhône Alpes. D’autres  sont liées au mouvement féministe, telles que Laïcité et Féminisme, Libres Mariannes ou Femmes Contre les Intégrismes.  Certaines sont focalisées dans un domaine comme Vigilance Travail social présidée par Guylain Chevrier (auteur par ailleurs de Laïcité, émancipation et travail social). Chaque association, membre du Collectif laïque national, est présentée en fin d’ouvrage.

 

Notons que la Fédération Nationale des Délégués Départementaux de l'Education Nationale (D.D.E.N.) est également membre du Comité national d’action laïque, au côté du syndicat des enseignants de l’UNSA, l’UNSA éducation, la Ligue de l’enseignement, et la Fédération des conseils des parents d’élèves. Le CNAL a été fondé en 1953, il est une émanation resserrée du Cartel national d’action laïque créé en 1944 avec la participation notamment de la CGT (encore unie), le parti socialiste SFIO et le PCF.    

 

Le préambule rappelle que des enseignants ou directeurs d’établissements scolaires sont régulièrement pris à parti par des agressions diverses allant jusqu’au meurtre. L’interdiction du port de l’abaya est saluée. On met en évidence que c’est à l’extérieur de l’école que le terrorisme s’apprend. La loi de 2004 a toutes les raisons d’être face aux tentatives communautaristes présentes. On remarque qu’un certain esprit a gardé une petite place, lorsqu’on s’autorise à écrire, à son propos : « La loi n’est plus seulement contestée verbalement par les communautaristes ou leurs "idiots utiles" (lesquels se présentent souvent sans rougir comme des vigies de la laïcité) » (page 12). Dans un premier cas, il s’agit d’un désaccord avec la Vigie de la laïcité et on prend le courage de l’assumer en citant clairement son nom, au risque de se voir répondre que la Vigie de la laïcité n’est pas en désaccord avec la loi de 2004. L’autre perspective est que ce soient des paroles visant des personnes en particulier et on se devrait aussi de préciser de qui on parle.  Peut-être qu’une opposition entre gens de bonne éducation laïque peut s’exprimer autrement que par l’injure.

 

Ce terme d’"idiot utile", devenu passe-partout, relève de ce registre de langage et n’est plus depuis longtemps que la marque d’une indigence intellectuelle. Il s’agit là d’ailleurs d’une expression attribuée à tort à Lénine alors qu’elle revient à un journaliste anglais qui, en 1864, qualifiait ainsi un électeur français qui avait écrit à Émile Olivier (alors député républicain sous le Second Empire) qu'il ne pourrait plus lui faire confiance car il avait commis l'erreur de voter avec le gouvernement (se rapporter à https://wordhistories.net/2021/03/26/useful-idiot/). En fait  Émile Ollivier est le rapporteur de la loi sur les coalitions, ce qui autorise la grève, illégale depuis la loi Le Chapelier, tout en la contenant dans certaines limites. 

 

Par ailleurs il est rappelé que l’enseignement privé développe sans contrôle une concurrence délibérément faussée car elle est basée sur une sélection sociale. Le "caractère propre" des établissements privés sous contrat est la porte ouverte au séparatisme non seulement social car il y a un risque d’un message qui tourne le dos à certaines valeurs de la République. Le contexte international a des répercussions sources de tensions dans les écoles. On s’étonne que le Président Macron, en matière de laïcité, « ne cesse de donner des contre-exemples ; après avoir annoncé vouloir "réparer le lien abîmé" entre l’État et l’Église, et offert une place particulière aux cultes dans les débats de bioéthique, il a participé le 8 décembre 2023 à la célébration cultuelle d’Hanouka à l’Élysée – infraction caractérisée à l’article 23 de la loi du 9 décembre 1905 » (page 25).

 

Les auteurs font des recommandations regroupées dans dix-neuf univers : Former à la laïcité, La citoyenneté commence à l’école, Développer l’école publique laïque, un devoir constitutionnel de l’État, Sorties scolaires : pour une loi garantissant le principe de laïcité de l’école publique et la liberté de conscience des élèves, La question des cantines scolaires, Appliquer la loi de 1905 sans chercher à la contourner, Respecter la neutralité religieuse des bâtiments et terrains publics, Les territoires de la République privés de laïcité : une incongruité, Le cas particulier de l’Alsace et de la Moselle : Concordat, statut scolaire local, cours de religion, La laïcité, condition de l’égalité femmes-hommes et du respect des droits des femmes, Laïcité de l’enseignement et de la recherche à l’Université, Défendre l’universalisme et la liberté d’expression dans la vie intellectuelle et l’expression culturelle, Poids des comportements communautaristes dans les entreprises, Crèches privées : la neutralité religieuse est conforme du droit, Laïcité et profession d’avocat, Laïcité à l’hôpital public, Laïcité et travail social, Sport et neutralité religieuse, Europe.

 

Il y a maintenant un référent dans chaque  établissement publics de santé cependant il est difficile de connaître toutes les atteintes à la laïcité réalisées par les agents. Le rapport remis par Patrick Pelloux en mars 2022 n’a fait objet d’aucune suite (https://sante.gouv.fr/ministere/documentation-et-publications-officielles/rapports/sante/article/rapport-sur-la-prevention-et-la-lutte-contre-la-radicalisation-des-agents). Se posent les problèmes des aumôniers, régis par charte de 2011. Se pose la question de leur action qui va vers l’ensemble des patients et pas vers les seuls se déclarant croyants. Par ailleurs ils sont parfois considérés, par certains professionnels, comme des collaborateurs occasionnels ? Ceci amène à des propos, comme ceux d’Arkadiusz Kozelak-Maréchal, que nous avions rapporté dans notre présentation Religion, spiritualité, laïcité et soin,  pour une médecine holistique « devrait permettre de réintégrer une dimension humaine, la dimension religieuse, trop souvent absente en raison d’une privatisation de la religion et d’une volonté de l’écarter de l’espace public ». Il s’agit de « naturaliser la religion dans les soins, au sens de la rendre à nouveau familière et naturelle, en tant qu’un phénomène humain parmi d’autres, afin  de lui redonner une place dans les soins et de s’en servir. Autrement dit, il s’agirait de penser la religion comme un outil thérapeutique ».      

 

En matière religieuse dans le sport « l’emprise islamique poursuit son offensive : après le port du voile par les féminines (qui perdure dans certains sports), c’est maintenant la demande d’interruption de matchs lors de la rupture du jeûne les soirs du ramadan (ramadan 2023). Certains arbitres ont accepté, suite aux menaces » (page 121).  

 

Dans le point " Défendre l’universalisme et la liberté d’expression dans la vie intellectuelle et l’expression culturelle", il est question de wokisme. On peut lire « ces approches sont d’autant plus dangereuses qu’elles résistent à toute discussion, et s’autoproclament comme vérités – voire come morale –  grâce à une novlangue au vocabulaire abscons, jamais scientifiquement défini, mais internalisé du fait  de sa grande diffusion médiatique » (page 97). « Depuis, l’intimidation physique est devenue un des moyens de la censure dans le cadre de la "cancel culture" – la culture de l’effacement  –, qui cherche à limiter la liberté de création, d’expression et d’opinion. Aux boycotts se sont ajoutés la réécriture et le traitement des œuvres du passé à partir d’une lecture politique et morale contemporaine qui ne tient nullement compte des contextes de production de ces œuvres du passé à partir d’une lecture politique et morale contemporaine qui ne tient nullement compte des contextes de production de ces œuvres , pour leur faire dénoncer systématiquement "le privilège blanc", "l’hétéro-patriarcat", "l’islamophobie" et, nouvelle venue la "transphobie". À l’épicentre de cette mouvance politique, l’association "Décoloniser les arts", crée en 2015, pèse sur le monde artistique et sur les structures de création et de diffusion pour impulser ses actions contre ce qu’elle désigne comme la pensée blanche (page 100). 

     

Dans le chapitre "Développer l’école publique laïque, un devoir constitutionnel de l’État", on donne divers arguments contre le dualisme scolaire. On y cite Claude Dagens, évêque émérite d'Angoulême (il célébra notamment les obsèques de François Mitterrand) et membre de l'Académie française. Ce dernier avait déclaré dans les premières années du XXIe siècle : « Il n’y a pas, par conséquent, semble-t-il, plus de sens pour que l’Église occupe ce terrain (de l’enseignement), sinon au risque de se laisser instrumentaliser au service d’une logique de privatisation en mettant à la disposition des privilégiés des systèmes privés de soin, d’éducation, etc… dont l’inspiration catholique n’est plus qu’une source d’inspiration lointaine et finalement inopérante qui risque de produire un contre-témoignage » (page 47).

 

Pour tous publics Aucune illustration

Benjamin

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