Avis de Benjamin : "Les flèches de l’arbalète avant les aiguilles de montre, mais toujours la qualité suisse au rendez-vous"
Le directeur du Théâtre de Valère à Sion (chef-lieu du canton du Valais), François Marin, va monter cette pièce de René Zahnd sur Guillaume Tell l'été prochain du 5 août au 6 septembre. René Zahnd nous incite à réfléchir sur ce que ce récit peut nous enseigner sur notre générosité, notre capacité de résistance, notre désir de liberté, nos faiblesses et nos qualités.
« C’est une histoire sur la liberté, bien sûr, mais avec en son centre un héros qui n’a rien d’un chef, qui agit plus par instinct que par calcul et qui, par une sorte d’"effet papillon", bouleverse l’ordre établi. (…) La question centrale n’est pas tant le chemin pour accéder à la liberté, mais bien la nature de la liberté que l’on cherche. » (page 84)
« Fürst. Nous avons déjà évoqué les risques de la guerre. Nous les avons soupesés. Pour ce qui me concerne, une autre réflexion me préoccupe. Je me demande si en agissant au nom de l’indépendance et de la liberté, nous ne risquons pas de nous retrouver à l’écart du monde. » (page 59)
On peut toutefois regretter qu’à trop vouloir rendre moderne le message que l’auteur voit dans les actions de Guillaume Tell, il se risque ponctuellement (page 78) à un type de discours anachronique entre le héros et sa mère :
« Rösli. La racaille politicarde. Belle race. Pleine d’avenir. Boucvert ! Tu sais. Ils ne pensent qu’à eux en feignant de s’intéresser aux autres. Ils ont une bourse à la place du cœur. Et un coffre sous le bonnet. Je les appelle les trois "ma".
Tell. Les trois "ma" ? Mamama.
Rösli. Manipulent, manigancent, m’agacent. »
La fameuse scène où Guillaume Tell tire court de la page 51 à 54, en voici un extrait:
« Gessler. Un instant. Ce n’est pas tout à fait terminé. Je t’ai bien observé. Il ne m’a pas échappé que tu as sorti deux flèches. Où est la seconde ? (…)
Tell. Si j’avais touché Walter, la seconde flèche aurait été pour vous. »
René Zahnd, dans la partie documentaire, rappelle que la légende de Guillaume Tell est apparue, cent cinquante ans après les faits rapportés, en 1470 dans le "Livre blanc de Sarnen". Nous rajouterons, d’après nos propres sources, qu’ à la fin du XIIe siècle le moine danois Saxo Grammaticus avait évoqué une histoire semblable à propos d'un personnage norvégien légendaire Hemingr, qu'il rebaptise Toko, et fait passer au service d’un souverain danois du Xe siècle, Harald dit Dent-Bleue. René Zahnd rapporte différentes adaptations littéraires du mythe, s’attardant plus particulièrement sur celle qu’en fit Friedrich Schiller. On peut aussi rappeler à René Zahnd que, sous la Terreur, les Jacobins firent de Guillaume Tell un héros, une sorte d'authentique révolutionnaire. Et pour conclure, nous ajouterons personnellement que Guillaume Tell fut prétexte à de plusieurs histoires humoristiques, comme celle-ci: "Un historien helvétique a révélé que Guillaume Tell a eu trois fils, toutefois les deux aînés sont morts à l'entraînement".
Pour connaisseurs Aucune illustration