Avis de Adam Craponne : "Laissez brûler les petits papiers, papier de riz ou d'Arménie"
Il s’agit d’évoquer l’Arménie à travers les relations qu’entretiennent les Arméniens de toutes nationalités (donc résidants ou non) avec le pays de leurs ancêtres. Dans son introduction l’auteure précise fort bien ses intentions :
« sur un mode non pas littéraire mais dynamique, de façon à susciter réflexion et questionnement, et en suggérant plus qu’en expliquant toute la complexité de la situation (…) souligner l’espoir qui découle de l’amour que lui portent ses fils, de son inépuidable énergie et de sa formidable capacité de résistance ». (page 8)
Plutôt que d’aborder dans un style universitaire les questions liées au passé, présent et futur de l’Arménie, elle a opté pour une formule bien moins didactique qui consiste généralement à aller interviewer une personne d’origine arménienne (sans lien avec la recherche universitaire) pour aborder avec elle l’approche originale de l’Arménie qu’elle a. Lorsqu’elle n’a pu trouver de témoins pour un point qui lui tient à cœur, c’est dans un style de journaliste qu’elle va traiter de la question. Ainsi par exemple pages 52 à 55, évoque-t-elle à travers la ville syrienne de Deir-ez-Zor à la fois la dernière étape de la déportation de 1915 et l’arrivée dans cette région des partisans de l’État islamique. De même aux pages 70 à 75, Sèda Mavian traite de la cité de Kessab, afin de rappeler une fois encore que les Arméniens sont présents en Syrie (actuellement prise dans la Guere civile), du fait en particulier de la présence du XIe au XIVe siècle du royaume arménien de Cilicie, un état fondé par des réfugiés arméniens fuyant l'invasion seldjoukide de l’Arménie. C’est aussi, avec Kessab, l’occasion de parler de la présence française dans l’Entre-deux-guerres tant dans les actuels Syrie, Liban qu’au sandjak d’Alexandrette. Ce dernier est cédé dans presque sa totalité à la Turquie en 1939, à l’encontre de tout ce qui constitue le droit international, mais la France en a distrait le village de Kesab.
Côtes de la Syrie
À travers cette vision globale, Sèda Mavian met en relief un point particulier en rapport avec la vie quotidienne et la culture du pays. En sept chapitres, ce sont une petite trentaine de textes qui interrogent sur les diverses raisons de la forte présence arménienne en Russie, le retour de descendants d’émigrés, l’existence de deux états arméniens (l’Arménie et le Haut-Karabagh qui est non reconnu mais peut s’appuyer sur le précédant du Kosovo), le dialogue arméno-turc, le métissage important des exilés…
Parmi les artistes ayant au moins une moitié de sang arménien (mère couturière de théâtre) est cité le cas du comédien métis (père antillais acteur) Pascal Légitimus qui exploita ce fait dans un de ces spectacles "Alone man show":
« J’ai été ballotté entre les deux cultures. Arménien, ça ne se voit pas. C’est vrai qu’il y a un délit de faciès, on ne voit que le côté antillais. J’avais envie de rétablir la vérité. »
Les musiciens Tigran Hamasyan et Alain Altinoglu sont également présents. L'auteur ne le signale pas mais le mamelouk Roustam Raza, ramené d’Égypte par Napoléon Bonaparte et devenu garde du corps de ce dernier, était un un Arménien né en 1781 en Georgie actuelle.
Pour tous publics Peu d'illustrations
http://www.marianne.net/Syrie-les-oublies-de-Kessab_a238925.html
http://syrie.blog.lemonde.fr/2014/04/07/lepuration-ethnique-des-armeniens-en-syrie-dramatiser-pour-mieux-mobiliser/
https://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/0600390926799-et-le-pays-de-lannee-est-larmenie-2232311.php