Avis de Octave : "Le cléricalisme voilà l’ennemi !"
C’est en Vendée départementale où se déroule l'action, dans un village tellement reculé qu’il sort presque du département et doit être situé plutôt à la limite des Deux-Sèvres, voire à la rigueur de Maine-et-Loire. En fait à 70 km de La Roche-sur-Yon, à part le village de Saint-Pierre-du-Chemin, il n’y a guère de communes et quelques allusions peuvent même le faire comprendre. Toutefois les faits réels qui ont inspiré le récit ne sont pas déroulés là car une institutrice Émilienne Simonneau a livré ses souvenirs pour l’enquête Ozouf et elle ne rapporte rien de tel pour la Belle Époque où elle et son père étaient en poste. En effet j’ai consulté son témoignage complet au Musée de l’éducation de Rouen, son témoignage est en parti repris dans Nous les maîtres d’école : autobiographie d’instituteurs de la Belle Époque paru chez Gallimard en 1973.
L’auteur ne connaît pas très bien l’histoire de la Vendée sinon il n’aurait pas parlé de "chouans" (terme qui désigne uniquement les contre-révolutionnaires au nord de la Loire). De plus il laisse entendre que Clemenceau était le chef des radicaux en Vendée, or Clemenceau ne s’est jamais mêlé de politique dans son département d’origine. Par contre son fils l’a fait dans l’Entre-deux-guerres mais dans une optique plus à droite que les radicaux, en gros des options laïques mais conservatrices socialement. Son absence de succès l’a amené à la Libération à se présenter en Seine-et-Marne sous l’étiquette du parti le plus à droite à l’époque (le PRL ancêtre du CNI et des Républicains indépendants). Notons que le personnage de Clemenceau est assez présent pour les évènements se déroulant au début du XXe siècle.
La dernière page se termine sur une note d’humour qui fait passer son héroïne pour une idiote auprès des gens un peu informés et qui deviendra vérité d’évangile pour les autres. Je ne pense pas que cela était l’objectif, en effet il fait dire à son personnage principal qu'aujourd'hui les laïcs défendent le port du voile (en prenant systématiquement position pour les descendants d’immigrés). Il faut croire qu’il interpréte très mal ceci https://www.ldh-france.org/Prise-de-position-de-la-LDH-dans/
Ensuite il avance que les catholiques de la Manif pour tous sont devenus les défenseurs de la loi de 1905 pour bouffer du musulman. Les choses sont un peu plus subtiles, il me semble: soutien au Concordat d'Alsace-Lorraine et appel à financer les écoles privées y compris hors contrat (type catholiques intégristes) sont deux des mamelles de ce mouvement. S’il avait eu une meilleure connaissance de l’histoire récente de la Vendée, il aurait été facile de terminer sur la situation assez comique autour du personnage de Clemenceau. Aujourd’hui il est encensé par toute la droite vendéenne fort présente au Conseil départemental (celle qui soutenait ardemment François Fillon) et il est honni d’une large partie de la gauche. Rappelons qu’en 1906 lorsque Clemenceau vint en Vendée pour un voyage officiel, en tant que ministre de l'Intérieur ; ceci alors qu’il a cependant stoppé les inventaires des églises, aucun parlementaire catholique n’accepte de le rencontrer.
Bref s’il y a malheureusement à médire à la marge sur les qualités d’historien du passé et du présent immédiat de l’auteur, est fort bien menée par contre l’intrigue qui mêle une action se déroulant en 1905 à des faits se passant à la fin du XXe siècle. Des faits de boycott de commerçants et d’instituteurs, suite aux évènements de 1905, sont attestés. Ils servent de prétexte à l’intrigue qui ne manque pas de rebondissement. Le personnage central est une Algérienne qui a fui les violences qui embrasaient son pays il y a quelques années.
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