Avis de Benjamin : "Vendée, liberté, égalité, fraternité, laïcité"
Cet ouvrage est donc paru pour le centenaire des lois laïques, il est très largement illustré et s’appuie parfois sur des témoignages oraux. La Vendée est le seul département français métropolitain (hors les départements d’Alsace-Moselle au statut concordataire) où l’enseignement catholique a toujours plus eu d’élèves que l’enseignement public depuis un siècle. Il est vrai que nombre de communes n’ont plus d’écoles publiques depuis la Première Guerre mondiale.
Ce conflit laissa certaines mères de famille face aux pressions psychologiques et tentation d’aide financière menées par le clergé local si leurs enfants sortaient de l’école communale pour aller dans le privé. Cet aspect précis n’est pas évoqué dans cet ouvrage, mais on en trouve trace dans tous les départements français. Alors qu’en 1910 (malgré une légère chute régulière depuis 1907) les élèves d’école communale sont encore juste 60% de l’effectif total du primaire dans ce département, en 1919 on ne compte plus que 49,6% d’enfants scolarisés dans l’enseignement primaire public.
Avant l’arrivée des lois laïques, les écoles de filles ont pour les deux tiers des enseignantes congréganistes ; pour les écoles de garçons il est vraisemblable que les proportions soient équivalentes entre maîtres laïques et enseignants d’un ordre religieux. Une des parties du livre pointe en particulier la résistance à la laïcisation des écoles tant au niveau du personnel que des locaux. Par contre je n’ai pas trouvé trace ici de l’opposition au contenu des programmes, ceci s’étant manifesté dans toute la France, par des listes publiées par l’assemblée des évêques, condamnant en 1886 puis en 1909 des ouvrages scolaires (notamment en histoire).
Un autre chapitre s’intéresse au recrutement sociologique mais aussi géographique des instituteurs . Majoritairement les instituteurs proviennent du sud de tradition républicaine et un apport non négligeable est due tant aux Deux-Sèvres qu’aux départements charentais. On a même des arrivées plus lointaines en provenance du Limousin ou du Berry.
Un chapitre est consacré aux principes de l’école républicaine et à leur illustration dans les manuels scolaires de la Belle Époque. Un mot est dit sur la proportion importante d’instituteurs publics morts durant la Grande Guerre. Ajoutons personnellement que cela s’explique par le fait que nombre d’entre eux étaient devenus sous-officier, voire sous-lieutenants et lieutenants du fait de l’hécatombe subie chez les militaires de carrière dans les premiers mois de guerre. Rappelons que ces gradés-là partaient au-devant de leur troupe et qu’une fois identifiée comme tels étaient des cibles prioritaires pour leur ennemi.
Des évènements en rapport avec la Ve République sont présents, que ce soit par exemple la mobilisation en 1960 contre la loi Debré ou les actions de 1981 à 1984 pour réclamer la fin du dualisme scolaire. Le Comité départemental d’action laïque de Vendée et la Fédération des œuvres laïques du même département prennent de nombreuses initiatives, ici rappelées, durant ce premier quart de siècle de la Ve République. Celles-ci concernent tant les deux moments évoqués précédemment que l'ouverture d'une école publique dans des communes où elle avait disparu depuis des décennies.
Il est dommage que n’aient pas été exploités les réponses des instituteurs de la Belle Époque au questionnaire proposé par Jacques Ozouf dans les années soixante. Pour les avoir nous-mêmes consultés, comme celles concernant les Deux-Sèvres elles sont singulièrement d’une grande richesse en matière d’ostracisation d’instituteurs dans leur commune après la loi de Séparation de l’Église et de l’État. Elles font apparaître également que l’Inspection académique n’hésitait pas à maintenir, au début du XXe siècle, un instituteur et une institutrice dans un village alors que chacun d’entre eux avait moins de dix élèves.
Pour tous publics Beaucoup d'illustrations