Avis de Benjamin : "Un ministre plus transcendant que son président"
Le Comité d’histoire du ministère de la Culture réalise depuis une vingtaine d’années un très remarquable travail de recherches historique et cet ouvrage en étant édité par la Documentation française devrait bénéficier d’un large lectorat. La disparition en 2011 de cet ancien parlementaire de la Côte-d’Or à 75 ans passés n’a pas permis d’éclaircir quelques points sur son action comme ministre de la Culture et de la Communication d’avril 1978 à mars 1981.
Dans l’introduction on rappelle que des études sur la politique culturelle du président Giscard d’Estaing ont montré le peu d’ambition de celles-ci, le classicisme de ses goûts affichés, sa méfiance dans l’action de l’État en matière de politique culturelle (d’ailleurs les pouvoirs publics se désengageront alors des Maisons de la Culture), se sont traduits par un soutien tourné essentiellement vers des réalisations de prestige qui lui permettraient de se mettre en scène en particulier lors des inaugurations (Centre Pompidou, Cité des sciences de La Villette et Musée d’Orsay) et vers les enjeux de la communication. (page 5)
Bref, contrairement à ce que déclare Jean-Philippe Lecat, le ministère de la Culture de cette époque n’était pas a priori très soutenu par leur président. À l’époque le budget de ce ministère représentait autour de 0,5% du budget total de l’État. Toutefois il est possible que des liens personnels entre Jean-Philippe Lecat et Valéry Giscard d’Estaing se soient noués et que lui ministre ait été plus écouté que ses prédécesseurs.
En effet, bien que député gaulliste, notre élu bourguignon devient le porte-parole du gouvernement de 1974 à 1976 puis celui du candidat Valéry Giscard d'Estaing lors des élections présidentielles de 1981. Ceci aurait évidemment permis une meilleure écoute au sein du Conseil des ministres des questions de culture. D’ailleurs dans ses voyages entant que président de la République, Giscard d’Estaing se faisait accompagner généralement par quatre ministres, qui étaient Jean François-Poncet, ministre des Affaires étrangères, Jean-François Deniau, ministre du Commerce extérieur, André Giraud, ministre de l’Industrie et Jean-Philippe Lecat.
Cette photographie n'est pas dans cet ouvrage
C’est une période où les industries culturelles se développent grandement et fidèlement à la doctrine libérale le mécénat est encouragé. Notre ministre dit qu’il pensait être d’arrière-garde le maintien du monopole public au niveau des radios, contrairement à Giscard d’Estain, mais qu’au moins il en profita pour lancer les premières radios locales décentralisées (dont Fréquence Nord et Radio Mayenne) placées sous la tutelle de FR3. On lui doit la création de la direction du patrimoine, du conseil et de la Mission du patrimoine ethnologique (avril 1980) et consécration de 1980 comme « année du patrimoine ». La création d’une nouvelle ligne budgétaire pour l’aide à la restauration et à la mise en valeur du patrimoine rural non protégé permettait de subventionner par exemple la restauration de lavoirs, de bâtiments agricoles, ou de moulins. Jean-Philippe Lecat a poursuivi la réflexion sur une loi fixant les conditions d’accès aux archives publiques et aux archives privées et il l’a fait voter. L’une des autres grandes initiatives de Jean-Philippe Lecat est la loi programme sur les musées ; elle a permis le développement d’enrichir les en particulier des musée d’Orsay, Picasso, de musées en région et du château de Versailles.
Cet ouvrage comporte quinze chapitres pour sa première partie, chacun est consacré à un sujet précis. Globalement les questions traitées évoquent la place de ce ministère dans l’appareil d’État, son fonctionnement et ses relations avec les autres ministères dont celui des finances. On traite également du rôle des grands établissements culturels nationaux (dans tous les domaines à savoir musées, opéra, théâtre…), des grands travaux présidentiels, de la décentralisation, des industries culturelles et du mécénat, des politiques en direction de tous les domaines culturels (arts plastiques, cinéma, théâtre…).
La seconde partie, bien moins conséquente, est quasiment une collection d’anecdotes autour d’actions ponctuelles du ministre comme celle qui constitue à protéger la collection des frères Schlumpf qui donnera naissance en 1982 au Musée de l’automobile de Mulhouse, certaines ont un rapport avec la Bourgogne comme celle évoquant le passé et le maire de la commune de Fontaine-Française en Côte-d’Or. La troisième partie regroupe des textes publiés par Jean-Philippe Lecat après 1981 sur des sujets culturels et quelques souvenirs de jeunesse. Dans les annexes fort intéressantes, on relève les éléments biographiques essentiels concernant notre personnage avec au milieu des informations sur la nomination des ministres de la Culture successifs et les dates d’élection des présidents de la République.
Pour connaisseurs Aucune illustration