Avis de Adam Craponne : "Le lion du cinéma iranien va vers ses cent ans"
Farid Esmaeelpour est à la fois cinéaste, un critique de cinéma et un doctorant en cinéma à l’université Paris-I-Panthéon-Sorbonne. Il a travaillé plus particulièrement sur le cinéma iranien et a également réalisé plusieurs films documentaires avec une action en France ou en Iran. Il consacre une monographie au cinéaste iranien Ebrahim Golestan car il pense que ce dernier est le premier à avoir sorti le cinéma de son pays des cadres où il était enfermé. Abbas Kiarostami a d’ailleurs rendu hommage à l’apport d’Ebrahim Golestan et Jafar Panahi reconnaît son rôle dans le cinéma iranien.
On n’avait avant les premières réalisations d'Ebrahim Golestan que des films de propagande et des fictions populaires. Ces dernières, souvent inspirées des productions turques et indiennes, sont qualifiées de films fārsis. Agnès Devictor en donne cette définition : « un mélodrame populaire où se retrouvent dans un dosage varié des séquences de chants, de danses, de bagarres et où le bien finit toujours par triompher ».
Javad Zeiny dans Le cinéma iranien - Un cinéma national sous influences, de 1900 à 1979 (chez le même éditeur) avait déjà avancé le rôle capital de ce cinéaste iranien. Selon Farid Esmaeelpour, Ebrahim Golestan a ouvert la voie au cinéma d’auteur iranien et si ce dernier se taille de jolis succès à la fin du XXe siècle et au début du XXIe siècle, il le doit aux apports de ses aînés et en particulier de ce dernier. Toutefois l’auteur ne manque pas d’évoquer en quelques pages également Farrokh Ghaffari.
Farid Esmaeel pour écrit d’abord rapidement la biographie de ce cinéaste. On apprend d’ailleurs que ce n’est qu’en 1925 que les Iraniens sont obligés de déclarer un nom de famille, auparavant seul leur prénom et le prénom de leur père servaient à les dénommer. Ebrahim Golestan est né le 19 octobre 1922 à Shiraz, il a été l’ami intime de la poétesse féministe Forugh Farrokhzad morte en 1967. Depuis 1975, il habite dans le Sussex en Angleterre.
Une caractéristique de la narration de Golestan est la succession de divers récits qui vont se révéler avoir un lien entre eux ; alors qu'un tel style a une longue histoire en Occident, ce genre de fiction commence en Iran avec Golestan. Par ailleurs Golestan enracine le scénario dans la littérature classique. Il a donné deux longs métrages de fiction : La Brique et le miroir (1964) et Les Secrets du trésor de la vallée de Djinn (1974). Ebrahim Golestan est essentiellement connu pour ses documentaires, il en a produit quinze. L'objectif est de décrire les caractéristiques de ces derniers, du point de vue des thèmes, du commentaire parlé, du son d’accompagnement, de l’image, de ses problèmes avec la censure.
On pourra retenir ceci :
« Le premier point commun entre ses films est qu’ils ont tous été réalisés à l’occasion d’un évènement. Un Feu par exemple relate un incendie d’un puits de pétrole. (…) La découverte des antiquités à Marlik a déclenché la production du film Les Collines de Marlik » (page 44).
« (au sujet du film Les joyaux dont l’esprit critique avait été approuvé par le Shah) quand le projet est mené à terme, le bureau de la censure du ministère de la culture d’Iran interdit le film à cause des commentaires de Golestan dans le film et ne permet pas sa diffusion. Dans ce documentaire Golestan met en question l’histoire des rois iraniens (surtout ceux de la dynastie Kadjar) en parlant de leurs joyaux mais aussi de leur incompétence, de leur prodigalité et c’est cela qui affole le bureau de censure » (page 45).
L’ouvrage propose une douzaine de photographies tirées de films. Malheureusement les films d'Ebrahim Golestan ne sont pas disponibles en DVD pour la langue française, espérons que cet ouvrage incite à les commercialiser.
Pour tous publics Peu d'illustrations
https://www.lindependant.fr/2018/12/09/le-palmares-du-premier-festival-international-du-film-politique-a-carcassonne,5007759.php
https://www.telerama.fr/cinema/films/la-permission,n5806128.php