Avis de sorayabxl : "Le mythe de l’enfant sauvage dans la France révolutionnaire"
Cet essai de Jean-Luc Chappey fait le pari original de réaliser une histoire politique du destin de Victor de l’Aveyron, un enfant « sauvage » capturé dans les bois de Lacaune, dans l’Aveyron, en 1799. L’histoire de Victor avait jusqu’à présent surtout intéressé les pédagogues et les scientifiques. Chappey s’intéresse quant à lui au contexte politique de la France du Directoire et de l’Empire. Il montre comment l’idéal révolutionnaire de « perfectibilité » sous-tend les efforts des autorités pour éduquer l’enfant, avant que son manque de progrès ne conduise à le déclarer « idiot » et donc incurable.
La thèse centrale de l’auteur est assez convaincante et l’ouvrage est bien documenté, malgré la relative rareté des sources dans les archives officielles. Le climat politique très tendu pendant la première décennie du XIXe siècle semble indiscutablement avoir pesé sur les décisions des institutions éducatives et scientifiques chargées de traiter le « cas Victor ». L’intégration des sauvages est alors étroitement liée à l’éducation des sourds muets. Chappey montre comment les efforts pour éduquer Victor sont abandonnés à mesure que le régime s’éloigne des idéaux républicains en faveur d’un certain « fixisme » politique, social, sexuel et racial, notamment à partir de 1802 et du rétablissement de l’esclavage par Napoléon.
Bien que l’ouvrage soit informatif et assez bien structuré, la lecture souffre d’un certain nombre de répétitions, et certains développements (par exemple sur le magnétisme) ne semblent pas avoir de lien direct avec le destin de Victor. À recommander principalement à ceux et celles qui s’intéressent aux représentations collectives pendant la Révolution française et l’Empire.
Ce commentaire est basé sur un exemplaire fourni par Fayard via NetGalley en échange d'une critique honnête et impartiale.
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