Avis de Georgia : "Une femme épatante au service de Victor Hugo"
Grisé par la légende de Bonaparte, son neveu Charles-Louis-Napoléon Bonaparte envisage de l'imiter, voire de l'égaler. Il doit pour cela tromper le peuple et se faire passer pour un bon républicain soucieux d'égalité et de démocratie, en pleine révolution sociale. Mais pour l'écrivain visionnaire qu'est Victor Hugo, ce ne peut être qu'un leurre, une tragique et mensongère duperie. Il affiche son mépris pour celui qu'il nomme Napoléon le petit.
Après l'abdication du Roi Louis-Philippe le 24 février 1848 en faveur de son petit-fils mineur, la République est proclamée. L'assemblée Nationale a rejeté la demande de régence de la duchesse d'Orléans, mère de l'héritier mineur. Le jeudi 11 décembre 1848, Charles-Louis-Napoléon Bonaparte obtient assez de suffrages (75%) pour devenir président de la République
Mais trois ans plus tard, le président réussit son coup d'état le et Victor Hugo prend les armes de la seule façon qu'il connaisse, avec le pouvoir des mots. Dans la nuit du 1er au 2 décembre 1851, Napoléon dissout l'Assemblée Nationale et opére un véritable coup de force, "un crime" selon Victor Hugo.
"C'est que Napoléon a l'ambition de l'Empire, dira-t-il.Au final, deux cent cinquante parlementaires seront arrêtés. L'Assemblée est devenue un foyer de complots, fait placarder Napoléon.Le peuple renâcle, tarde à réagir. Le président n'a t-il pas promis le rétablissement du suffrage universel ? Mensonges et trahison, pense Victor Hugo qui va s'engager jusqu'au bout de ses forces.
Prête à le suivre au bout du monde, sans relâche, malgré la peur, sa maîtresse Juliette Drouet épie les soldats, déjoue les pièges et cherche inlassablement des cachettes pour son grand héros.Un lien indéfectible de tendresse les lie encore et toujours. Elle classe ses notes, répertorie ses nombreux dessins et écrit ce qu'il lui dicte, occupé avec ses misérables.
Lui, brave la police, monte au sommet des barricades et harangue les foules. Il devient l'homme à abattre, traînant derrière lui cette aura, une lumière d'espoir qui encourage les ouvriers. Juliette est trop fière de le suivre, consciente de n'être rien sans lui, rien d'important malgré son talent d'écriture qui lui a permis de s'attacher à Victor Hugo.
La femme se révèle, la maîtresse trouve un second souffle. Une aventurière est née. Le coup d'état donne un sens à sa nouvelle vie et la sauve de cette tristesse absolue de devoir partager son homme avec l'autre, plus jeune, plus belle, celle qui a plus de manières et un statut social, adoubée en apparence par la famille Hugo. Léonie. Léonie d'Aunet, épouse Biard.
Ancienne actrice en mal de rôle, Juliette ne fait plus illusion face à la belle Léonie. Mais après le coup d'état, les choses ont changé, Juliette Drouet devient essentielle pour Victor Hugo qui court de réunions secrètes en rendez-vous annulés, prononce des discours enflammés sur les barricades. Il se déplace sans arrêt, échappant à la folle ivresse des soldats qui obstruent les rues, massacrent sur les faubourgs puis s'en prennent aux grands boulevards.
Juliette devient son ange gardien. Les barricades se sont effondrées sous les canons et les baïonnettes ; l'insurrection est matée. L'opération Rubicon en hommage à Jules César a réussi. Louis Napoléon Bonaparte sera Empereur. Il n'y a plus rien à faire, hormis fuir. Ce sera Bruxelles, Hugo part sous un nom d'emprunt, seul par mesure de précaution. Juliette le rejoindra plus tard, emportant avec elle la malle des écrits du grand écrivain.
Cinquante ans d'amour et de soutien. Elle meurt avant lui. Sa juju n'est plus et Toto doit survivre (surnoms affectueux qu'ils se donnent mutuellement). Il reconnaîtra que "l'ordre de me fusiller si j'étais pris avait été donné dans les journées de décembre 1851.Si je n'ai pas été pris et par conséquent fusillé, si je suis vivant à cette heure, je le dois à Madame Juliette Drouet qui, au préil de sa propre liberté et de sa propre vie, ... a veillé sur moi sans relâche..."
Ce livre est un vibrant hommage à cette femme incroyable qu'est Juliette Drouet. Elle n'est plus la maîtresse délaissée, mais une compagne indispensable, pleine de ressources. Pourtant, même en exil, elle doit continuer à se cacher pour préserver les enfants de Victor Hugo. Beaucoup plus tard, le maître reconnaîtra son courage et avouera que sans elle, il serait mort, probablement fusillé. . .
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