Avis de Ernest : "Qui se cache derrière ce Buisson?"
Le Dictionnaire de pédagogie et d'instruction primaire, document capital pour comprendre l’organisation de l’enseignement en France sous la IIIe République, est associé à Ferdinand Buisson ; pour sa rédaction il s'entoura de plus de 350 collaborateurs. On dispose de deux éditions celle de 1887 et celle de 1911. La première est consultable en ligne ici https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k24232h/f6.item alors que la seconde est disponible sur CD-ROM.
On trouve dans la première édition, un article intitulé "prière" et on peut lire à ce propos qu’elle est « un acte de la conscience ayant pour objet principal l’amélioration de l’âme, ce que les philosophes nomment la vertu et les théologiens la sainteté ». On rapporte là d’autre part ainsi la pensée du Suisse Jean Conrad Amman : « "Faisons de chaque élève un nouvel habitant du monde où nous vivons" car c'est les rendre à la vie, ces pauvres créatures, que de leur donner la voix, "cette émanation de l'esprit immortel de vie que Dieu souffle dans le corps de l'homme en le créant "».
Ferdinand Buisson est pourtant un féroce anticlérical mais il souhaitait une laïcité non dépourvue d’une recherche spirituelle. Ferdinand Buisson pense qu’en chaque être humain se trouve une aspiration à une forme de spiritualité. Pour lui l’école doit s’appuyer sur cette appétence pour instruire et former des Français, républicains dans leur comportement porté par un idéal transcendant.
Ferdinand Buisson est inspecteur primaire de la Seine en 1872 et 1873 puis directeur de l’Enseignement primaire de 1879 à 1896. Comme l'écrit Pierre Kahn: «Ferdinand Buisson est issu du protestantisme libéral, qu’il conçoit comme une religion de la conscience et de l’intériorité, adogmatique et aconfessionnelle, donc profondément compatible avec l’idéal laïque». Il fut l’artisan tant des lois sur l’instruction obligatoire que de celle de l’interdiction des congrégations enseignantes et de celle de la Séparation de l’Église et de l’État. Pourtant ce sont les noms respectifs de Jules Ferry, Émile Combes et Aristide Briand qui sont rentrés dans l’Histoire.
En 1898, Ferdinand Buisson participe à la création de la Ligue des droits de l’homme qu’il présidera de 1913 à 1926. Il est député radical-socialiste de la Seine de 1902 à 1914 puis de 1919 à 1924. En 1914 il a été devancé au premier tour par un candidat socialiste.
En 1905, il est le président de la commission parlementaire qui rédige le texte de la loi de séparation de l’Église et de l’État. En 1909 il rédige le premier rapport parlementaire en faveur du suffrage féminin bien qu’il soit conscient que ce nouveau droit favorisera les suffrages catholiques.
Chaud partisan de l’Union sacrée et ardent propagandiste du retour de l’Alsace-Lorraine à la France, il dénonce certains aspects culpabilisants pour l’Allemagne du traité de Versailles. Il se veut ensuite l’apôtre d’un rapprochement entre les deux peuples situés des deux côtés du Rhin, s’engage avec espoir dans l’idée que la SDN pourra éviter des conflits à l’avenir. Ces diverses actions lui valent un prix Nobel de la Paix en 1927 en compagnie de l’ancien député bavarois Ludwig Quidde.
Patrick Cabanel s’est d’abord attaché à revisiter les origines familiales de Ferdinand Buisson et les raisons de son séjour en Suisse (il est professeur à l'Académie de Neuchâtel qui joue le rôle d'une université) à la fin du Second Empire. L’auteur remet en cause la légende dorée que Ferdinand Buisson a construite particulièrement sur ces deux points.
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