Michèle Dassas

L’ouvrage est sous-titré L’histoire extraordinaire de l’institutrice aux millions d’élèves. C’est une image car Augustine Tuillerie ne fut jamais enseignante que quelques mois. Elle est née à Laval, rue du Val de Mayenne en 1833 d'un père, prénommé Auguste André, fabricant de toiles originaire de Sévigny dans le même département. En 1853 elle se marie avec Jean Guyau qui tient un commerce de cotonnades dans la préfecture de la Mayenne.

Elle a pour cousin Alfred Fouillée, de cinq ans plus jeune, alors lycéen à Laval. En octobre 1854 elle donne naissance à Jean-Marie Guyau (futur professeur de philosophie). Toutefois elle souffre de la jalousie extrême de son époux et face à la maltraitance de ce dernier, avec son enfant elle court se réfugier chez ses parents.  En conséquence, le divorce étant devenu impossible par une loi de 1816 avec le retour de Louis XVIII, la séparation est prononcée entre les deux époux en juin 1855.

Le commerce du père faisant faillite, Augustine part habiter Sèvres avec ses parents et son fils. Elle devient aide-soignante avant l’heure auprès d’une dame âgée semblant impotente. Elle se fait escroquer par celles-ci. Durant quelques mois elle enseigne dans quelques internats. Après avoir donné naissance à une fille (qui mourra en bas âge) dont le père est Alfred Fouillée, Augustine se présente comme la sœur de ce dernier. Notons qu’au début de sa carrière professionnelle Alfred Fouillée ne travaille pas dans des lycées d’état, comme le dit l’auteur, mais dans des collèges communaux qui comme les premiers préparent alors au baccalauréat avec une scolarité démarrant en sixième (alors que les lycées ont des classes dès la 11e).

Augustine va dorénavant suivre Alfred au gré des nominations de ce dernier comme professeur de philosophie à Douai, Montpellier, Bordeaux et à l’École normale supérieure. On verra comment successivement, sous le pseudonyme de G. Bruno, elle conçoit des ouvrages de lecture à dimension multidisciplinaire pour les classes avancées de l’école primaire.

Ce seront successivement Francinet paru en 1869, Le Tour de la France par deux enfants sous-titré "Devoir et patrie" édité neuf ans plus tard dans sa version d’origine (une édition à couleur laïque paraît en 1906) et Le Tour de l’Europe pendant la guerre sorti en 1916. Sachons que Le Tour de la France par deux enfants est largement en usage dans les écoles communales jusqu’en 1923 (date de nouveaux programmes) et que son utilisation perdure dans quelques classes encore pendant près d'un quart de siècle. En 1941, le gouvernement de Vichy fait publier pour chaque département quels sont les ouvrages autorisés parmi ceux en usage, on trouve mention de ce livre pour un petit nombre de départements dont celui de la Vendée. Cette remarque nous est propre et elle est le fruit de recherches personnelles.

Terminons en précisant que Michèle Dassas livre ici un roman s’appuyant sur une riche documentation (au XXIe siècle, on dit  "très documenté"). Quelques illustrations, surtout de pages du Tour de la France par deux enfants, n’auraient pas été un luxe.