Avis de Ernest : "Un livre avec une bonne vingtaine de cartes, tableaux généalogiques et reproductions de document ne peut être foncièrement mauvais"
Voilà un auteur et un éditeur qui ont compris qu’un bon livre d’histoire ne peut se passer d’illustrations et ici en plus d’illustrations tirées par exemple de vitraux ou de la Tapisserie de Bayeux, l’auteur a construit des cartes d’un grand intérêt. La première montre les villes du royaume de France qui subissent des raids vikings entre 820 (Noirmoutier, en 841 ce sera justement Rouen et Jumièges) et le début du Xe siècle (Landévennec en 913 avec une fuite des moines emportant les reliques de Saint Guénolé à Montreuil au nord de la Picardie et Dol en 936). Une autre montre l’expansion du domaine normand, en y chassant les souverains bretons, qui se fait entre 911 et 931 (il y a un quasi doublement de la surface entre ces deux dates), une autre pointe l’oganisation diocésaine de la Normandie au XIe siècle, ce qui permet de voir que les alentours de Domfront sont maintenant rentrées dans l’escarcelle des comtes résidant à Rouen et que l’évêché de Sées comprend une partie (le Corbonnois qui correspond en gros au Perche) qui échappe à la domination normande.
Gisant du tombeau de Rollon dans la cathédrale de Rouen
L’auteur nous livre, en huit chapitres, un tableau éclairant non seulement de Rollon mais des raids vikings, des conditions d’octroi et de consolidation du pouvoir comtal. En prime les mots vikkings passés en langue française!
Il rajoute aussi un fort intéressant chapitre où l’on peut voir comment l’hagiographie évoque les origines troyennes des Danois (en les confondant au peuple grec des Danéens), l’intervention de la main de Dieu dans le lignage normand ainsi que le statut de saint attribué au duc Richard Ier (mort assassiné en 996 en Flandre). "Rollon : le chef viking qui fonda la Normandie" est un livre qui vient combler un manque de connaissances sur un personnage qui dans les manuels d’histoire de l’école primaire de la IIIe république des Trente glorieuses était représenté comme faisant humilier le roi Charles le Simple en envoyant un de ses guerriers soulever le pied du souverain jusqu’à hauteur de sa bouche. Ces faits, repris par Lavisse, sont tirés d’un texte de Dudon de Saint-Quentin (page 106 de "Rollon : le chef viking qui fonda la Normandie"). Or ce dernier avec De moribus et actis primorum Normanniae ducum ("Des mœurs et des Actions des premiers ducs de Normandie") réalise là une œuvre de commande pour le compte du duc Richard Ier ainsi que de ses deux fils (l’un successeur au comté et l’autre archevêque de Rouen). On a donc à mettre en doute toute véracité à cet épisode de l"Histoire de France et en reprenant cette légende Lavisse permet de justifier l'usurpation du grand-père d'Hugues Capet, à savoir Robert Ier.
Pour connaisseurs Beaucoup d'illustrations
https://www.lefigaro.fr/culture/paris-a-t-il-ete-sauve-des-vikings-grace-a-ce-tresor-carolingien-exhume-en-pologne-20210611