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La vache et le veau

La vache et le veau
Marivole240 pages
1 critique de lecteur

Avis de Adam Craponne : "Qui part à la guerre, perd une place de père"

Germain Rallon est né en 1896 de parents petits commerçants dans un village Aubigny, situé dans le nord-est des Deux-Sèvres ; cette commune avait alors environ 450 habitants.  Il participe à la Première Guerre mondiale et raconte de façon assez fidèle cette expérience dans le roman historique "Le Pote". À compte d'auteur, il fait imprimer "Deux Larmes", un ouvrage réédité par la Gallimard en 1941 sous le titre "l'Ouche aux Brebis". Il est instituteur dans l’Entre-deux-guerres ; fanc-maçon, il est révoqué par le gouvernement de Vichy et malgré ses efforts sous l’Occupation pour être réintégré il doit attendre la Libération pour cela. Il réintègre donc l'éducation nationale pour l'année scolaire 1944-45 mais meurt d'un infarctus en juin 1945 à Thénezay où il avait enseigné de 1926 à 1940. Germain Rallon est devenu le principal vecteur identitaire de cette commune, située non loin de Parthenay et Poitiers.                      

"La vache et le veau" a été écrit sous l’Occupation et le manuscrit ayant été perdu, il n’avait jamais été édité. Il faut rendre hommage à l’éditeur Marivole pour porter à la connaissance des lecteurs du XXIe siècle, les meilleurs auteurs régionalistes de la IIIe République. C’est ce choix global qui nous permet d’accéder à la lecture de ce troisième et dernier roman de Germain Rallon.

Des notes soit de l’auteur, soit des deux préfaciers nous renseignent sur le de certains mots liés à la culture agricole de l’époque ou des expressions aujourd’hui disparues, comme "faire le renard" pour "faire l’école buissonnière". On est avec la première partie de ce récit en phase avec la moitié des oeuvres d’Ernest Pérochon (ce dernier a également donné dans le roman historique, la science-fiction, la nouvelle et la poésie), l’aîné de Germain Rallon de onze ans, également instituteur en Deux-Sèvres mais à la Belle Époque. En effet on suit la première phase de modernisation des campagnes françaises, celle de l’Entre-deux-guerres que nos deux écrivains ont vécu au présent.

« L’année 1924 apporta un renouveau de prospérité aux Ormes. Jusqu’à cette date, en effet, les paysans de la région se méfiaient des engrais complémentaires que d’aucuns n’utilisaient qu’avec parcimonie, à titre d’essai seulement, taxant de grippe-sous les dirigeants des industries chimiques et leurs dépositaires. Le premier de ce terroir, Joudé sema audacieusement la poudre blanche sur ses guérets, et ses récoltes en furent doublées. Ernest Brémaud fit de même pour ses prairies ».  (page 61)

Comme souvent dans ces romans paysans les désirs de s’emparer du champ des voisins entrent en concurrence avec les relations naissantes entre hommes et femmes du village, le tout parasités par des accidents (parfois mortels) ou des maladies dont on meurt. L’influence du curé reste forte dans cette partie du Poitou qui n’est point protestante comme dans certains villages du sud des Deux-Sèvres et encore moins dissidente comme des communes du nord-est de ce même département où le Petite Église s’est maintenue. Si les garçons vont à l’école publique par contre toutes les filles partent à l’école catholique. La première partie de l’ouvrage voit un des personnages principaux devenir rapidement veuf et se clôt par son remariage avec sa voisine qui vient de perdre son mari (page 150).     

Dix ans séparent cette période de la seconde, ce qui nous amène en 1939. Cette fois ce sont les conséquences de la guerre qui vont venir bouleverser un projet de mariage espéré par tous depuis l’enfance des deux concernés. Ici l’Occupation dure quatre années complètes (seule une petite portion du Poitou oriental est en zone libre), aussi la coexistence entre soldats allemands et population locale a-t-elle le temps de voir se nouer des liens de toutes sortes. Et le sens du titre "La vache et le veau",  qui fait allusion à une fille-mère qu’on épouse, apparaîtra dans les dernières pages.  L’auteur a connu tout l’univers qu’il décrit ; comme tous les instituteurs de l’époque (souvent secrétaires de mairie en plus), il baignait complètement dans cet espace sans pour autant coller à toutes ses valeurs et son mode de vie. C’est donc un regard distancié plein de finesse qu’il nous livre ici.      

Pour tous publics Aucune illustration

Adam Craponne

Note globale :

Par - 751 avis déposés - lecteur régulier

675 critiques
07/05/15
Samedi 23 mai 2015 à Thénezay un après-midi entier consacré à Germain Rallon
http://static.reseaudescommunes.fr/cities/161/documents/ieq0udu04qa4td.pdf
333 critiques
06/01/16
Samedi 23 JANVIER 2016 à 17 heures médiathèque de Parthenay (79) et Dimanche 31 JANVIER à 14 salle de la Jauletrie à Assais (79) lecture-spectacle "La peine des hommes" d'après des textes de Germain Rallon.
19/09/16
Parution cette semaine (23 septembre) chez Marivole de Deux Larmes, version originale de l'Ouche aux Brebis, paru à la NRF en 1941, roman qui a fait connaître Rallon auprès du grand public! A ne pas manquer.
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