Avis de Adam Craponne : "Le bon Pétain, la brute Darnand et le truand Henri Lafont"
Le 14 novembre 2014 sur RMC découverte l’émission "Les grains de sable de l'histoire" est consacrée au coup de main du 14 juillet 1918 d’un groupe de grenadiers français (l’équivalent des corps francs allemands, appelées aussi section d’assaut) qui permet de s’emparer des plans de la dernière attaque allemande sur le front ouest. Voir http://www.dailymotion.com/video/x2geezh_les-grains-de-sable-de-l-histoire_news
Il faut comprendre que depuis plusieurs mois le front de l’est est quasiment désorganisé côté russe et qu’après des armistices successifs la paix a été signée début mars entre les Soviétiques et les Allemands. Les Allemands en profitent pour envoyer d’importants renforts sur le front Ouest et le Reich lance sa dernière offensive avant que les Américains n’aient pris un poids capital dans le nombre de soldats et le matériel. Éric Brunet dans "Un monstre à la française" nous raconte la vie de celui qui commandait ce groupe de grenadiers, à savoir le sergent Joseph Darnand. S’il est passé dans l’histoire, c’est cependant en tant que chef de la Milice du gouvernement de Vichy.
Rentré dans ses foyers à l’été 1921 avec le grade de sous-lieutenant, il a servi deux ans comme militaire de carrière en particulier en Cilicie face aux (plutôt que contre les) armées turques. Dans l’Entre-deux-guerres, après avoir adhéré à l’Action française Darnand la quitte pour les Croix-de-feu, le PPF et La Cagoule. L’ouvrage montre l’évolution de la Milice et de son chef durant l’Occupation. Après l’invasion de la zone sud, un certain nombre de miliciens passent à Londres ou dans la Résistance. Darnand lui-même, à cette époque, tente d'établir des contacts avec le général de Gaulle, ceci par l'intermédiaire de Groussard (ancien de la Cagoule), chef d’un service de renseignements de Vichy.
Éric Brunet reste distancié par rapport à son personnage, par contre il le présente comme le chef pas toujours au courant des exactions des miliciens et les réprimant dans la mesure du possible (page 247). D’autre part, il a un peu trop tendance à nous seriner que les premiers résistants venaient de l’orbite de l’Action française. Il pointe bien l’alliance de circonstance entre Déat (ancien professeur, un des rares chefs collaborateurs fer de lance de la défense de la laïcité et porteur de la dimension pacifiste de gauche) et Joseph Darnand (d’un milieu catholique et militariste). Une partie finale donne quelques informations sur un peu le passé et plus l’après-guerre de personnages qu’a fréquentés Darnand. Aussi bien dans son récit (page 247) que dans les notes, il ignore que le milicien Henry Ernest Charbonneau né le 12 décembre 1913 à Saint-Maixent (et je le soupçonne de lui avoir donné le prénom de son fils, qui est d’ailleurs responsable du Front national pour les Deux-Sèvres) a épousé Jeanne Brevet la nièce de Joseph Darnand (cette dernière s’est remariée avec le belge Léon Degrelle en 1984 avec lequel elle vivait depuis plusieurs années). On aurait aimé à l’intérieur une photographie de face de Darnand.
Prudemment Éric Brunet présente ce roman comme un roman historique et un personnage comme Victor Mathoux instituteur et fils d’instituteur, décrit sous des couleurs fort noires, relève de la fiction. L’auteur aurait pu éviter de nous dire qu’il deviendra communiste, mais c’est un petit plaisir de dénigrement auquel il semble de ne pas avoir pu résister.
Pour connaisseurs Aucune illustration