Avis de Zaynab : "Difficile de trouver un message plus bonapartiste dans un cas et plus conservateur dans l’autre"
Le premier récit "Le Napoléon des neiges" étoffe largement un fait légendaire ou historique en lien avec le passage de Napoléon à l’école militaire de Brienne (vers Dijon) lorsqu’il avait une dizaine d’années. L’anecdote a longtemps été attribuée à Bourrienne, homme politique et diplomate français, camarade de Napoléon:
« La troupe joyeuse accueillit ce projet avec enthousiasme, racontera l'un des élèves; il fut exécuté, et cette petite guerre simulée dura l'espace de quinze jours; elle ne cessa que lorsque des graviers ou de petites pierres s'étant mêlés à la neige dont on se servait pour faire des boules, il en résulta que plusieurs pensionnaires, soit assiégeants, soit assiégés, furent assez grièvement blessés. Je me rappelle même que je fus un des élèves les plus maltraités par cette mitraille. » (Mémoires de M. Bourrienne sur Napoléon, tome 1, 1829).
Cependant, selon J. Tulard et L. Garros dans Itinéraire de Napoléon au jour le jour: 1769-1821, le sujet de ce récit est paru pour la première fois vers 1797 dans une brochure anglaise traduite sous le titre de Quelques notions sur les premières années de Bonaparte.
Serge Boëch a ajouté essentiellement la dimension d’un Napoléon Bonaparte justicier, défendant les petits martyrisés par les grands et l’univers de la trahison (anticipant les défections ultérieures de nombre de ses généraux). Serge Boëch attribue d’ailleurs, dans la partie documentaire de l’ouvrage, à Napoléon la formule : «Défendez-moi de mes amis, moi le me charge de mes ennemis». En fait c’est Antigone II, un roi de Macédoine, mort en 239 av. J.-C, un petit-fils de deux diadoques d’Alexandre le grand qui est à l’origine de ce mot d'esprit. Ce texte est vraiment bien charpenté et il séduira nombre de jeunes garçons qui s’identifieront facilement au héros, d’ailleurs d’autant mieux que l’univers des boules de neige, malgré le réchauffement climatique, ne leur est pas totalement inconnu.
Une seconde histoire "Élise, l’orpheline des barricades" présente une enfant Élise dont le père est parti pour une carrière de révolutionnaire professionnel. Je ne suis pas sûr que de montrer un père Alphonse abandonnant son enfant pour "s’engager dans de nobles causes" et d’ajouter que contrairement à lui, Justin a réussi dans la vie en utilisant les perspectives de la société de l’époque, soit le meilleur moyen de faire comprendre à un enfant que ceux qui ont porté les révolutions de 1830 et 1848 étaient des gens respectables. Ceci d’autant que la mère de l’héroïne ne porte pas sa haine à l’encontre des soldats qui tuent Alphonse en 1848, mais à l’égard de la révolution (ceci de façon très explicite). Révolution de 1848 dont on ne dit pas un mot dans la fiction, on se rattrape certes dans les pages documentaires mais leur côté peu attrayant (en dehors des pages d’interview de Serge Boëch) fait craindre que ces dernières soient peu lues.
Le récit est prétexte d’évoquer Victor Hugo et Élisa Lemonnier, personnage historique très intéressant dont on ne dit pas un mot à part qu’elle est la fondatrice de l’enseignement professionnel pour les femmes en France (mais de façon bien moins claire que je l’exprime). Militante de diverses causes avec ou sans son mari, ils vivent eux avec enthousiasme les journées de février 1848 où le régime de Louis-Philippe tombe. Quatre illustrations en noir et blanc (pour l'ensemble du livre) aident par deux fois à mieux saisir l’atmosphère de chaque époque.
Accessible jeunesse Quelques illustrations