Avis de Ernest : "En 1848 déjà républicain modéré mais pas modérément républicain"
Jules Dufaure appartient au moment de la République des Jules (Favre, Ferry, Simon), ce sont ces trois derniers, Adolphe Thiers et Jules Dufaure qui jouent un rôle essentiel dans l'instauration de la IIIe République. Or si Jules Favre, Jules Ferry et Jules Simon sont des républicains historiques, Adolphe Thiers et Jules Dufaure sont eux des républicains plus tardifs, de la dernière heure pour le premier et de la veille pour le second.
En effet tous deux ont été député et ministre sous la Monarchie de juillet, le premier appartenant au Parti Du mouvement et le second au Tiers parti, deux nuances du centre gauche dont les représentants voient dans la Charte d’août 1830 une étape vers un régime plus démocratique et souhaitent des mesures permettant l’extension du pouvoir de suffrage. D'autre part ils sont pour le principe des nationalités et donc pour dégager les peuples des tutelles de souverains qui leur sont étrangers. Jules Dufaure, dans les années 1840, se rapproche des idées d'Alexis de Tocqueville. Ce dernier dans un courrier parle de lui ainsi en 1852 :« Je dirais volontiers de celui-là que c’est un homme de pierre, aussi immuable et impassible ». Ces trois-là sont des opposants au régime du Second Empire. Relevons que Jules Dufaure fait adopter le scrutin d'arrondissement à une Assemblée élue en 1871 au scrutin de liste et que ce scrutin consolida la division en deux camps opposés.
Illustration absente du livre
Adolphe Thiers est le premier à porter le titre de Président de la République en 1871 et Jules Dufaure celui de Président du Conseil en 1876. Lorsque face à l'acceptation du régime républicain par une bonne majorité des députés élus en 1876 (393 contre 140), le président Mac-Mahon entend peser sur les nouvelles élections qu'il provoque en 1877, tout deux s'engagent passionnément dans la défense de l'idée républicaine. Ce sont des républicains conservateurs et avec les républicains de gauche (ou républicains opportunistes), ils bâtissent les institutions de la IIIe République.
Il est significatif que la dernière prise de parole Jules Dufaure se fasse lors de la discussion de l’article 7 de la loi relative à la liberté de l’enseignement supérieur (1880) et c'est l'occasion pour lui de défendre ses convictions de catholique libéral contre la politique anticléricale de Jules Ferry. Pour lui : « La République a besoin plus que tout autre forme de gouvernement de s’appuyer sur les saintes lois de la religion, de la morale, de la famille, sur la propriété inviolable et respectée, sur le travail encouragé et honoré ».
Dans La République des ducs, Daniel Halévy caractérise Dufaure comme cela : « Conservateur assurément, mais conservateur bourgeois et ennemi du parti noble; catholique assurément, mais catholique bourgeois, régulier dans la paroisse, non pas familier dans la sacristie, ennemi du parti-prêtre et des moines, ce qui montait et bouillonnait en lui, c'était la sève ancienne, la sève reverdissante de ses jeunes années, des lointaines années où les militants libéraux avaient abattu la restauration bourbonnienne ».
Jean-Louis Berhet nous conte les parcours privé, professionnel et politique de Jules Dufaure en nous montrant combien la vie de ce dernier est ancrée dans le département de la Charente-Inférieure (aujourd'hui Charente-Maritime). Notons toutefois qu'il mena sa carrière d'avocat à Bordeaux d'abord puis à Paris (où il s'illustra dans la défense de personnalités libérales mises en accusation par le Régime de Louis-Philippe). Jean-Louis Berhet nous éclaire fort à propos sur une personnalité aux convictions libérales et dans le "ni droite ni gauche" et le "en même temps".
Pour tous publics Quelques illustrations