Avis de Adam Craponne : "Elle voit des Vikings partout"
Pierre Bauduin avait déjà donné un remarquable "Que sais-je" sur le sujet en 2004, et il nous livre ici une version quasi encyclopédique de son savoir dans le domaine. L’introduction cite un passage du récit de la création de l’abbaye de Maillezais où on raconte, qu’en remontant la Sèvre niortaise, les Normands massacrèrent un grand nombre de colliberts (serfs). Quelques années plus tard, à la fin du Xe siècle, le duc d'Aquitaine construisit là une fortification afin de prévenir un retour des vikings.
De l’introduction on retiendra que les sources nordiques contemporaines de la période viking distinguent le nom masculin víkingr (au pluriel víkingar), appliqué à une personne, et le mot féminin víking, qui renvoie à une activité. « Le contexte d’utilisation du mot suggère que les víkingar agissaient en groupe, pour des opérations militaires liées à la piraterie ou du moins aux activités maritimes. La voking renvoie à une activité de cette nature : partir i vikingu, c’est aller généralement en expédition maritime à des fins de commerce et/ou de prédations » (page 14). Notons que les Scandinaves qui s’aventurèrent sur les routes de l’Orient furent appelés Rus ou Varègues. Le mot "drakkar" provienr de "dreki " fait référence à l'ornementation du dragon sur leur navire.
Les premiers raids vikings enregistrés en Occident débutent à la fin du VIIIe siècle et s’achève durant la seconde moitié du XIe siècle. Il en reste l’image du Viking païen et destructeur mais ces hommes du nord pouvaient être aussi des commerçants (éventuellement d‘ailleurs en commercialisant ce que d’autres ont pillés). Leur épopée sert, au XIXe siècle, à la construction du roman national tant dans chacun des pays scandinaves existant alors et au Royaume-Uni. Toutefois dès le XVIe siècle les littératures danoises, suédoises et anglaises se sont déjà inspirées de l’histoire des vikings. Notons que les nazis s’intéressèrent également à cet héritage culturel.
Après un premier volet consacré à la construction de l’image des Vikings et aux sources disponibles aux historiens d’aujourd’hui, on entre dans une seconde partie intitulée "Des sociétés en mouvement". On trouve là huit chapitres respectivement intitulés : Des sociétés de l’âge de fer, Royaumes, royautés et chefs (IXe-Xe siècles), Croyances et vie religieuse, Groupes et liens sociaux, Hommes et femmes, Ressources et activités. La troisième branche du livre se nomme "Des invasions normandes à la diaspora viking" et ses chapitres sont : Les débuts du mouvement viking, Navires, navigation et itinéraires, Grands espaces, "petits mondes", Migrations, landnám et diasporas.
La quatrième partie "Guerre, violences et paix aux temps vikings" est composée des chapitres suivants : Les aspects militaires, La violnce des temps vikings, Prédation et tribut, Faire la paix avec les vikings. Le cinquième volet est le plus copieux. Il compte huit chapitres : Un temps de transferts culturels, Le passage au christianisme, La formation des monarchies chrétiennes scandinaves, Les nouvelles sociétés des terres, L’Est de l’Europe : un modèle ground ?, Des communautés vikings en terre celtique : différents processus à l’œuvre, Les facettes multiples de l’accommodation : le cas de l’Angleterre, Une expérience continentale : la Normandie.
On a appris ailleurs qu’en 1485, Ivan III a pris le titre de "souverain de toute la Rus' ", désirant montrer sa volonté de reconstituer tout l'héritage de Vladimir de la dynastie des Riourikides (issue des colons varègues, donc vikings) qui, plus fort que Clovis, accepte le baptême à Chersonèse en Crimée en reconnaissance pour la prise de la ville en question, de la main de la princesse byzantine demande le baptême à Chersonèse en Crimée en échange de la prise de la ville, de la guérison de ses yeux et en perspective du mariage avec une princesse byzantine. On apprend ici, page 455, que le mot "Rus’" a été adopté par les Slaves à partir d’une racine norroise qui, désignant des rameurs, passée par le finnois renvoie au nom de la Suède (d’où on arrivait par bateau). Pierre Bauduin montre combien les processus d’intégration et d’acculturation comme les influences réciproques ont été nombreux et féconds là comme ailleurs.
Dans sa conclusion, l’auteur note que les entreprises vikings cessent à l’époque où démarrent les croisades. D’ailleurs Éric Ier roi de Danemark vers 1100 meurt en cours de pèlerinage et Sigurd Ier roi de Norvège, quelques petites dizaines années après sa montée au trône, participe à une croisade qui l’emmène à Jérusalem en 1110. Dès le milieu du XIIe siècle, les sagas mettent en scène les épopées des guerriers vikings.
coup de coeur !Pour connaisseurs Peu d'illustrations
https://trustmyscience.com/decouverte-rare-deux-bateaux-funeraires-viking/
https://lepetitjournal.com/stockholm/labordage-dune-decouverte-de-tombes-vikings-261893
https://www.futura-sciences.com/sciences/questions-reponses/histoire-histoire-vikings-leur-epopee-13777/#xtor=EPR-72-[QUESTIONHISTOIRE]-20210114