Avis de Xirong : "Et pourquoi Aroles, il se décarcasse ?"
- Françoise Labalette, L’enfant sauvage de Champagne, "Historia" numéro 728, août 2007, pages 30-33.
- Jean-Paul Denise, L’enfant sauvage de Songy, "Champagne Généalogie" n°77, 1996.
- Serge Aroles, "L’énigme des enfants-loups", Paris, Publibook, 2006 (l’article de Françoise Labalette s'inspire de cette étude).
- Serge Aroles, "Marie-Angélique (Haut-Mississippi, 1712 - Paris, 1775). Survie et résurrection d'une enfant perdue dix années en forêt", Terre, 2004
Il faut dire qu’il faudra aller trouver là ou sur internet des compléments d’informations sérieux à cette BD en particulier à Marie-Angélique Memmie Le Blanc sur wikipedia en anglais qui renvoie à un site consacré exclusivement à notre personnage.
En effet les auteurs de cette BD ne maîtrisent pas toujours l’environnement géographique et historique qu’ils nous content, alors qu’ils disent s’être inspiré des écrits de Serge Aroles. Un exemple typique est le fait que le livre ouvre sur : « Septembre 1731 forêt de Saint-Martin-aux-Champs, Marne » et cet anachronisme de qualifier un village champenois de "marnais" avant la Révolution se répète. Bref autant on comprend que, pour les périodes où on ignore ce que fut vraiment la vie du personnage, on romance, autant on a du mal à accepter que le scénario ne s’appuie pas sur ce que d’autres ont trouvé par la recherche historique ou que si ce qui a été découvert soit mal mis en perspective.
C’est évidemment les pages sur l’enfance qui souffrent le plus de ce choix d’ignorer ce que fut la vie réelle de Marie-Angélique. Il est évident que sa mère n’alla pas la confier de son plein gré aux Français (page 60), ceci d’autant que dans le cadre des alliances liées à la rivalité franco-anglaise, sa tribu est soutenue par les Anglais dans sa lutte contre les Hurons et les Français.
On sait qu'elle était née en 1712 dans l’actuel Wisconsin au sein de la tribu des Renards ou Meskwaki . Elle est plus vraisemblablement une enfant recueillie par ceux qui ont attaqué sa tribu.
Toutefois on peut rendre hommage à l’idée, dans cette BD, de bien rendre compte de l’attachement entre l’enfant et sa mère. Si Victor et Marie-Angélique évoluèrent si différemment c’est que le premier fut privé de toute relation affective et sociale de sa naissance au moment où il fut recueilli, alors que notre personnage vécut entre 1712 et fin 1721 (date approximative de la fin de la peste en Provence) au milieu soit des siens, soit de Français. Elle vécut donc à l’état sauvage entre 10 et 19 ans, d’ailleurs non seule puisque accompagnée d’une jeune noire du même âge, les deux jeunes femmes remontant de Marseille vers la Champagne. Ceci permet de découvrir en particulier qu’un mur contre la peste fut construit pour protéger le Comtat venaissin de l’épidémie, il en reste aujourd’hui d’ailleurs quelques vestiges vers Cavaillon et Apt.
Même si l’on peut regretter certains choix dans les aspects de la vie de l’héroïne, le récit fait preuve d’une bonne dramatisation, dévoilant progressivement le destin de cette dernière en alternant les passages sur la vie antérieure et ceux sur la vie postérieure à 1731 de celle-ci. Il y a par ailleurs d’une bonne approche de la vie sous Louis XV dans les classes aisées et des hommes et femmes célèbres comme Voltaire ou l’épouse de Louis XV (Marie Leszczyńska, la fille de l’ancien roi de Pologne devenu duc de Lorraine) apparaissent. Malheureusement l’évocation d’un viol, même s’il est traité pudiquement, et l’importance des références culturelles obligent de déconseiller cet ouvrage à des moins de 13-14 ans.
Voici ce qui est écrit à son sujet dans "Histoire d’une jeune fille sauvage trouvée dans les Bois à l’âge de dix ans", un livre publié vers 1760 par Marie-Catherine Hecquet, mais que l’on peut attribuer à La Condamine :
« Au mois de septembre 1731, une fille de neuf ou dix ans pressée par la soif, entra sur la brune dans le Village de Songi, situé à quatre ou cinq lieues, de Châlons en Champagne, du côté du midi. Elle avoir les pieds nuds, le corps couvert de haillons et de peaux, les cheveux sous une calotte de calebasse, le visage et les mains noirs comme une Négresse. Elle étoit armée d’un bâton court et gros par le bout en forme de massue. Les premiers qui l’apperçurent s’enfuirent en criant, voilà le Diable ; en effet, son ajustement et sa couleur pouvoient bien donner cette idée à des Païsans. Ce fut à qui fermeroit le plus vîte sa porte et ses fenêtres. Mais quelqu’un croyant apparemment que le Diable avoit peur des chiens, lâcha sur elle un dogue armé d’un collier à pointes de fer ; la Sauvage le voyant approcher en fureur l’attendit de pied ferme, tenant sa petite masse d’armes à deux mains, en la posture de ceux, qui pour donner plus d’étendue aux coups de leur coignée, la lèvent de côté, et voyant le chien à sa portée, elle lui déchargea un si terrible coup sur la tête qu’elle l’étendit mort à ses pieds »
Pour tous publics Beaucoup d'illustrations
samedi 11 avril 2015 à 15h
dédicace à 16h
musée de la bande dessinée et librairie de la Cité
1 quai de la Charente
16000 Angoulême