Avis de Octave : "Les soldats tiraient à Huy et à dia"
Il y a trois cents ans en 1713 le traité d'Utrecht établissait, non une paix durable en Europe, mais fixait quasiment la frontière de la France de Dunkerque à Longwy (mis-à-part le cas du duché de Bouillon et quelques rares places fortes enclavées).
André Corvisier, qui a donné entre autres les ouvrages Les Généraux de Louis XIV et leur origine sociale en 1959, L'armée française de la fin du XVIIe siècle au ministère de Choiseul: le soldat pour 1964, Louvois en 1983 et La bataille de Malplaquet, 1709. L'effondrement de la France évité en 1997, a réalisé peu avant de décéder, la préface de La guerre de siège sous Louis XIV: Au cœur du champ de bataille de l’Europe. Il rappelle là le goût de Louis XIV pour la guerre de siège, ce qu’avait également affirmé Joël Cornette en 1993 dans Le Roi de guerre. Essai sur la souveraineté dans la France du Grand Siècle.
L’ouvrage ouvre intelligemment, en préliminaires, sur le cas de la principauté ecclésiastique de Liège qui s’étend sur un peu plus de 100 km du nord au sud entre à l’ouest Hainaut ainsi que Brabant et à l’est entre le duché du Luxembourg (de l’époque) ainsi que le Limbourg. En effet, depuis que la ville de Liège a été pillée en 1468 par les armées de Charles le Téméraire puis que la principauté a retrouvé dix ans plus tard son indépendance (avec la mort du dernier), les terres de l’évêque de Liège ont un statut de neutralité. Mais comme cette dernière n’a pas les moyens de s’opposer au passage des troupes étrangères (cela anticipe d’ailleurs quelque chose) aussi sans jamais prendre partie dans les conflits entre Pays-Bas ou Espagne ou Autriche (la transmission du pouvoir des Habsbourg d'Espagne à ceux d'Autriche se fait entre 1713 et 1714) contre France, la principauté de Liège se voit souvent ravagée par des armées où l’intendance est à l’état embryonnaire.
En 985 la cité d’Huy (entre Namur et Liège) suit les destinées de la principauté de Liège dont elle devient la seconde "Bonne ville". Dans une seconde partie l’auteur étudie le cas particulier de cette principale place forte de l’ancienne principauté de Liège dont décident de s’emparer des armées ennemies pour leur propre sécurité. En trente ans, la cité d'Huy est assiégée sept fois en 1674, juin 1675, juillet 1693, septembre 1694, août 1703, juin 1705, juillet 1705. Elle est prise non seulement à ces occasions mais aussi suite à quatre attaques par surprise. La ville d’Huy a donc connu une douzaine de changements de mains. Finalement, après toutes ces occupations successives, les fortifications de la ville seront détruites en 1717 car c’est le prix a payé pour obtenir l’évacuation par les troupes hollandaises de la forteresse.
Le siècle de Louis XIV est un siècle de guerres et durant ce si long règne de Louis XIV les Pays-Bas espagnols ne furent en réelle paix que durant très peu d’années. La première partie de l’ouvrage (qui couvre une soixantaine de pages) est entièrement consacrée à l’art de la poliorcétique telle qu’elle est conçue au XVIIe et XVIIIe siècle au service des Français et Hollandais. Non seulement Jean-Pierre Rorive s'intéresse à la défense de la ville de Huy en particulier et aux techniques militaires liées à la guerre de siège de façon plus générale, mais aussi aux conditions de vie de sa population, à l'armement utilisé, à l'espionnage, aux reconnaissances… Il conclut que l'attaque prend le pas sur la défensive dans les conditions matérielles de l’époque. Le livre propose une illustration très abondante, variée et souvent originale.
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