Avis de Xirong : "Toi en bazin, moi en nankin, tous deux en escarpin (chanson Trempe ton pain, Marie)"
La comptine Trempe ton pain, Marie raconte l'histoire de deux amoureux qui se promènent le long de la Seine à Suresnes chaque dimanche. C’est la version originale Talking love qui a servi pour la traduction de Parlez-moi d’amour ; Talking love est sorti en 2018 simultanément à la version anglaise. L’auteure, de nom de famille Xue 薛 et prénom Xinran 欣然 (avec un sens qui renvoie à l’idée de joie ou bonheur, comme cela est expliqué page 365) est connue en Occident par un pseudonyme renvoyant à son seul prénom.
Xinran fut la Ménie Grégoire (ou la Brigitte Lahaie) de 1989 au début des années 1990 sur la radio du Henan, une province assez centrale de la Chine traversée par le Fleuve jeune et qui a abrité une des capitales de la Chine à savoir Kaifeng. Elle passe ensuite, avec un rôle similaire, sur la radio du Jiangsu une province côtière au nord de Shanghai (qui abrite l’ancienne capitale Nankin) où elle exerce jusqu’en 1997, cette année-là elle s’installe en Angleterre.
Xinran donne des romans autour de ce même sujet, ceux-ci semblent être traduits, avec un décalage de quelques années, en chinois. Xinran est l'auteure d’une chronique bimensuelle sur la Chine pour The Guardian, elle collabore ponctuellement avec la BBC.
Dans la conclusion de l’ouvrage, l’auteure pointe la contradiction actuelle en Chine entre la fidélité aux principes familiaux et les désirs matériels. Dans l’avant-propos, après avoir évoqué l’expression "talking love", qui se traduit en chinois par tán liàn'ài 谈恋爱 elle a cherché à réfléchir au fait que cela renvoyait en chinois à "falling in love".
Dans ce récit de témoignages,Xinran nous raconte l’histoire d’une femme Rouge qui n’est pas née durant la Révolution culturelle (comme on pourrait spontanément le penser) mais en 1920 à Tianjin (où il y avait d'ailleurs une concession française à l'époque). En fait elle se prénomme Anhong, mais on n’a pas la signification en chinois ; ce pourrait être Rouge foncé. L’auteure, d’après ce qu’on déduit, a rencontré cette personne en 2008 ou 2009 à Pékin.
Le mariage arrangé en 1929 entre une jeune femme de neuf ans et un garçon de treize ans, du fait des troubles que connaît la Chine, ne se conclut qu’en 1949. Le problème est qu’entre temps, le jeune marié Baogang est devenu officier dans l’armée du général nationaliste Fu Zuoyi ; ce dernier est toujours resté très en marge du pouvoir du Guomintang et s’est rallié aux communistes début 1949. Si bien que Baogang a été intégré dans l’Armée de libération du peuple alors que Linda, devenue orpheline, a suivi son oncle à Taiwan, en passant par Hainan.
On apprend au passage que le président Kennedy bloqua l’idée de Tchang Kaï-chek de reconquérir la Chine, suite à la famine qui y sévissait alors. Ce n’est qu’en 1992 que Baogang apprit que Linda était morte en 1963 en mettant au monde un enfant. Pendant des décennies, les deux époux vivent plutôt en frère et sœur.
Cette histoire est la plus originale, mais on bénéficie également du récit de vie de Verte (une des sœurs de Rouge) ainsi que de sa fille Grue et de sa petite-fille Lili. Apparaissent aussi les destins d’une fille Kangmei et petite-fille Wuhen descendantes d’Orange, une autre sœur de Rouge. C’est un impressionnant tableau de l’évolution de la condition féminine en Chine, toutefois dans les milieux socialement favorisés.
coup de coeur !
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