Avis de Ernest : "L’empire des steppes, c’est la paix !"
José Frèches raconte là la première partie de la vie de Gengis Khan, rappelons que le personnage meurt en 1227 à la tête d’un empire qui va des frontières de la Corée à la Mer Caspienne et du cours du Fleuve Jaune au cours de la Toungouska pierreuse (un affluent de la rive droite de l'Ienisseï).
Le discours tenu est très romancé à la fois dans le fond où tout est fait pour nous rendre sympathique un personnage qui a priori ne l’est pas dans l’Histoire et dans les détails comme avec des personnages comme cette gouvernante byzantine et le précepteur chinois vieille Cime qui conte les exploits d’Alexandre le Grand et la vie du premier empereur chinois au héros.
On aurait aimé vu le contenu hagiographique que José Frèches choisisse un narrateur interne qui aurait été proche de Gengis Kahn. Serait passé plus facilement des discours tenus sur l’amour des animaux ou dévalorisants pour les ennemis du héros et l’impasse sur les atrocités commises à son initiative. Avec un narrateur externe passent très mal par exemple des phrases sur les Jürchet (ancêtre des Mandchous) qui ont fondé l’empire Jin (allant du Fleuve bleu au cours de l’Amour, à la naissance de Gengis Khan) et donné pour la première fois un statut de capitale à la cité qui allait devenir Pékin. Nul doute que certains lecteurs, y compris ceux qui ne connaissent "ni des lèvres ni des dents" ces bouffeurs de pattes d’ours, digèreront mal le discours suivant :
« Les Jurchet descendaient des Tangout, une ethnie qui élevait des chevaux dans les steppes de Mandchourie orientale. Ces nomades ne se lavaient pas, ne changeaient jamais de vêtements, et dormaient à la belle étoile les trois quarts du temps. Leur seul luxe était des saouleries à l’alcool de sorgho que les Chinois leur vendaient au prix fort alors qu’eux-mêmes leur bradaient leurs petits chevaux. » (page 322)
D’un ancien conservateur du Musée Guimet, même dans un livre destiné au grand public, on attendait autre chose que la mauvaise adaptation que les blancs américains tenaient sur les indiens au moment de la conquête justement des prairies. La première partie de "Gengis Khan : l’homme qui aimait le vent", consacrée à l’enfance du héros est baptisée, "Comment naît un chef vers 1165-1178", suivent "Vers 1178-1183 Börte" (cette dernière est l’épouse de Gengis Kahn), "Vers 1184-1205 le début de la gloire". On apprécie la carte qui, sur une double-page, montre trois étapes (les origines, 1207 et 1227) la progression des conquêtes mongoles sous Gengis Kahn.
Le second volume de José Frèches sur Gengis Khan devrait paraître en janvier 2016, nul doute que la dimension de conquérant pacifiste devrait quelque peu resortir. Ceci nous ramène à notre titre qui est une allusion à la fois à un slogan du futur Napoléon III, qui d’ailleurs de Pékin et Saïgon au Mexique, en passant par la Crimée amena ses troupes d’un bout du monde à l’autre et à ce qu’on appelle "la paix mongole" (marquée entre autre par une grande neutralité religieuse et des conditions exceptionnelles de sécurité pour les voyageurs).
Pour tous publics Peu d'illustrations