Avis de Xirong : "Le soft power n’exclut pas le hard power"
L’ouvrage est sous-titré Enjeux et limites d’une "offensive de charme". Le hard power chinois c’est plutôt la main basse sur nombre d’îlots de la Mer de Chine ainsi les tensions avec Taiwan qui se traduisent par de multiples pressions sur divers organismes et sociétés privées (avec récemment l’affaire des compagnies aériennes, voir https://taiwaninfo.nat.gov.tw/news.php?unit=56&post=135269) , c’est aussi d’avoir fait de la Grèce, de la Hongrie, de l’Espagne et du Portugal ses chevaux de Troie dans l’Union européenne (aller à https://www.euractiv.fr/section/commerce-industrie/news/macron-esseule-sur-le-controle-des-investissements-chinois/). Au sujet du plus timide soft power de Taiwan, se reporter à https://asialyst.com/fr/2018/11/08/pour-briser-isolement-taiwan-recherche-nouveau-soft-power/
De l’ouvrage d’Audrey Bonne, on retiendra l’excellente idée de se reporter à Pascal Ory qui « identifie dans chaque exposition huit fonctions de la modernité que sont l’exhibition technologique, la foire commerciale, l’exposition d’architecture en plein air, le levier urbanistique, le salon des Beaux-arts, la garden-party de la puissance invitante, la société des nations et la fête populaire » (page 122).
Dans son introduction, l’auteure rappelle que la culture chinoise est d’une grande richesse et ancienneté ; disons que la culture de l’Empire du milieu a une ampleur équivalente à l’ensemble des cultures occidentales. Elle poursuit en donnant quelques clés autour des principaux éléments structurants de cette culture ; ce sont le taoïsme, le bouddhisme, le confucianisme et la langue. Audrey Bonne met en exergue que depuis le début du XXIe siècle, le mot d’ordre du Parti communiste chinois est de construire une société harmonieuse basée sur la lecture particulière qui est faite de certains écrits de Confucius. On peut aussi retenir qu’il s’agit d’éviter, dans la vie privée d'un Chinois, tout excès dans ses actes. La réaffirmation nationaliste, portée par Xi Jinping, se traduit aussi par le développement des Instituts Confucius (plus de 500 dans le monde entier en 2017) et l’organisation sur le sol chinois de grands évènements sportifs, culturels, techniques et économiques de portée internationale.
L’ouvrage est composé de trois parties, comprenant trois chapitres chacun. Le premier volet est "2002-2007 : le développement de l’action culturelle extérieure de la République de Chine", on y trouve "L’émergence pacifique de la République populaire de Chine dans la mondialisation culturelle", "Les Instituts Confucius, instruments du soft power chinois", "Multiplication des manifestations et des échanges culturels entre la Chine et le reste du monde". La deuxième partie se nomme "2007-2012 : La République populaire de Chine, une puissance culturelle", elle se divise en "Promotion du soft power culturel et accueil controversé des jeux Olympiques de Pékin", "La République populaire de Chine renforce sa diplomatie publique : la percée internationale des médias chinois", "L’organisation de l’Exposition universelle de Shanghai en 2010 : couronnement de la République populaire de Chine en tant que puissance culturelle". Le dernier volet porte le qualificatif de "Depuis 2012 : bilan de dix années de diplomatie culturelle", avec comme sous-parties : "Le tournant de la politique étrangère sous Xi Jinping : entre rivalité et coopération culturelle", "La dispora : relais de l’influence culturelle chinoise dans le monde", "La République populaire de Chine, une réelle influence culturelle sur la scène internationale".
Notons que depuis de nombreuses années la télévision chinoise a des chaînes en anglais, français, espagnol, russe et arabe. On peut d’ailleurs y voir d’intéressants téléfilms et des documentaires pittoresques. Dix pages sont consacrées au cinéma chinois, on y apprend qu’au milieu des années 2010, des coproductions chinoises, comme Le Promeneur d’oiseau et Le dernier loup ont eu de grands succès. Audrey Bonne nous fait revenir en mémoire les incidents sur le parcours européen de la flamme olympique en 2008, l’instrumentalisation de Confucius lors de la cérémonie d’ouverture et l’impossibilité pour les journalistes étrangers de sortir du ghetto qui leur fut dessiné, sauf à risquer une agression policière. Ajoutons que les Jeux olympiques d’hiver se dérouleront en 2022 à Pékin ; cette dernière devient donc la première ville à accueillir les JO d’hiver et les JO d’été. Évidemment des épreuves, comme le ski nordique, le ski alpin, le bobsleigh ou le skeleton auront lieu à environ cent kilomètres de la capitale chinoise.
Le problème est évidemment qu’on laisse aux autorités chinoises la possibilité de noyer les étrangers dans l’image de la Chine qu’ils construisent pour l’extérieur. Le premier Institut Confucius en France fut implanté au sein de l’Université de Poitiers; il est évident qu'un enseignant de ces centres culturels, rattachés ou pas à une université, font attention au dicours qu'ils peuvent délivrer et que les invités pour des conférences ne vont pas choisir de s'exprimer sur des sujets sesibles. Le discours critique de journalistes ou universitaires ne perce guère, vu les difficultés qu’ils rencontrent dans leur propre accès à l’information et au peu de lecteurs, d’auditeurs ou de (télé)spectateurs qu’il touche. Notons qu’après avoir été diffusé sur les télévisions suisse et belge, le documentaire Le monde selon Xi Jinping est diffusé sur Arte le mardi 18 décembre 2018 à partir de 20h50 (https://www.arte.tv/fr/videos/078193-000-A/le-monde-selon-xi-jinping/).
On apprécie que soient donnés la transcription phonétique et l’idéogramme pour certains mots comme "chinois d’outre-mer", ce qui donne 华桥 huáqiáo.
Pour tous publics Peu d'illustrations
http://french.xinhuanet.com/2019-04/24/c_138006106.htm