Avis de Adam Craponne : "La Jeanne d’Arc africaine"
De nombreux pays ont leur Jeanne d’Arc : la Chine en la personne entièrement légendaire de Mulan, l’Albanie avec la tout aussi mythique Yanitza Martinay en 1911, la Pologne grâce à Emile Plater-Zyberk en 1830, la Bosnie de la Belle Époque avec la néerlandaise Jeanne Merkus (née à Batavia), l’Inde grâce à Rani Lakshmi Bai lors de la Révolte des Cipayes.
Le Dahomey a ses amazones du XVIIIe au XIXe siècle et le futur Angola connaît une reine guerrière au XVIIe siècle. C’est de celle-ci Nzingha, souveraine du Ndongo et du Matamba dont il est question ici, sous la plume de Jean-Michel Deveau.
La reine Nzingha, bien qu’elle ait eu des rapports complexes et parfois hostiles envers le christianisme est toutefois à l’origine dès la première partie du XVIIe siècle de la christianisation d’un nombre non négligeable de populations vivant dans l’actuel Angola. Certes à la fin du XVe siècle Nzinga a Nkuwu, roi du Kongo voisin, comme aucune carte ne le présente très malheureusement, était déjà passé au catholicisme. Ces deux souverains se convertissent évidemment face à la pression portugaise car pour éviter certains malheurs à leur peuple, ils ont compris qu’ils peuvent avoir un intérêt à passer par la case (sic) du prêtre afin de se voir considéré comme allié du roi qui est à Lisbonne.
Nzingha est la sœur du roi Ngola-m’-Bandi ; elle convint en 1622 d'un traité de paix par lequel le Portugal acceptait de quitter fort d'Ambaca sur le Lukala et il y eût échange de prisonniers. C’est au cours de ce séjour qu’elle fut baptisée sous le nom d’Anna (page 13) ; il est possible qu’elle ait décidé de compter sur ce nouveau Dieu pour l’aider à prendre le pouvoir. Ngola-m’-Bandi reprend toutefois les hostilités contre les Portugais et vaincu il doit se cacher. Il meurt empoisonné à l’instigation de sa sœur et cette dernière devenue reine fait tuer le fils de Ngola-m’-Bandi en vengeance du meurtre de son propre fils qui avait été décidé par Ngola-m’-Bandi.
Revenue au paganisme, elle va organiser des jeux du cirque et entretenir tout un réseau d’espions pour assurer un contrôle sur son peuple ; elle s’oppose de longues années aux Portugais grâce à l'aide des Pays-Bas récemment indépendants.
Sont abordées les questions de l’esclavage où on découvre que ce sont des bateaux hollandais puis brésiliens qui raflent des esclaves, est donné un conte conçu par les nègres de cette région pour expliquer la disparition massive de leurs congénères (transportés aux Amériques) et sont étudiées les circonstances dans lesquelles a pu exister un certain cannibalisme chez ces peuples (cas de famine et non rites comme l’affirment les missionnaires).
L’auteur explique que les sources écrites dont on dispose, venant uniquement des Portugais, sont peu fiables à la fois pour les périodes où la reine Nzingha est louée du fait qu’elle est catholique (elle revient au christianisme après avoir perdu le soutien hollandais, même si un pseudo miracle vient expliquer ce retournement) et les années où elle est païenne. Jean-Michel Deveau a donc un regard critique sur l’histoire de cette reine, mais pas toutefois jusqu’ à renoncer à écrire qu’en 1622 (juste avant qu’elle ne déclare sa foi en Jésus-Christ) lors de son ambassade auprès du gouverneur portugais :
« En la reconduisant dans ses appartements, le gouverneur fit remarquer à Nzingha que la femme qui lui avait servi de siège était toujours là dans la même position. À quoi elle répondit qu’elle le savait très bien mais qu’il ne convenait pas que l’ambassadrice d’un grand roi ne se servit deux fois du même siège. Elle abandonnait cette femmes aux mains des Portugais qui n(avaient qu’à s’en servir à leur convenance » (page 12).
Une grande avenue porte le nom de cette reine à Luanda (capitale de l’Angola) et en 2002 une statue, servant à illustrer la couverture du livre de Jean-Michel Deveau, fut érigée à Kinaxixi à l'occasion du 27e anniversaire de l'indépendance.
Pour connaisseurs Aucune illustration
L'histoire de la reine Nzingha dans une BD en ligne dans sa totalité
http://unesdoc.unesco.org/images/0023/002301/230103e.pdf
Vendredi 5 juin à 19 H Espace Niemeyer 1er sous-sol, métro Colonel Fabien.
http://www.la-croix.com/Culture/Expositions/Au-Quai-Branly-exposition-pour-decouvrir-Congo-chretien-2017-01-10-1200815955