Avis de Grégoire : "Pour spécialistes de Tacite ... ou de Groucho Marx !"
Publius Cornelius Tacitus, dit Tacite, a rédigé dans les premières années du IIe siècle après JC un ensemble d'ouvrages qui sont autant de sources fondamentales de connaissances sur l'empire Romain.
Les plus connues de ces oeuvres, qui sont aussi les plus étudiées, sont les Histoires (Historiae, 109 : description de l'empire Romain de la seconde moitié du premier siècle, dont il nous reste seulement la moitié) et les Annales (Ab excessu diui Augusti, 110 : Histoire de la première moitié du premier siècle, en particulier règne des empereurs Tibère et Néron). Ces deux livres constituent les opera maiora - oeuvres majeures.
Les autres écrits de Tacite, appelés opera minora, ne sont pas moins riches - c'est ce que propose de montrer l'ouvrage d'Olivier Devillers que nous présentons ici. Les opuscules, terme qui revient souvent dans l'ouvrage, sont constitués de l'Agricola (De uita Iulii Agricolae, 98 : biographie hommage du beau-père de Tacite, général et sénateur), de la Germanie (De situ ac populis Germaniae, 98 : ouvrage qu'on peut considérer comme le premier travail d'anthropologie de l'Histoire romaine, concernant les barbares germaniques du Nord de l'empire) et du Dialogue des orateurs (Dialogus de oratoribus, 102 ou 107, entretien poético-philosophique sur l'évolution de l'éloquence notamment lié au changement de régime politique).
L'institut de recherche sur l'Antiquité et le Moyen-âge de Bordeaux - appelée Ausonius en référence à Decimus Magnus Ausonius, écrivain et politique aquitain du IVe siècle après JC - présente ici une synthèse après une journée d'échanges entre chercheurs spécialistes de la question tacitéenne. Le livre se présente comme une succession d'articles en français, anglais et italien, fruit du travail de chercheurs français, anglais, italiens, mais aussi américains et même congolais, le tout orchestré et présenté par Olivier Devillers. Une première remarque donc : les travaux étant restitués dans leur langue d'origine, le lecteur aura besoin de bases linguistiques solides, en particulier en anglais (un seul article en italien : celui de Maria Antonietta Giua).
Les publications sont précises, très documentées et référencées, avec beaucoup de notes de bas de page. Une bibliographie très complète accompagne les textes.
Il s'agit non pas de la présentation des écrits tacitéens proprement dit, mais plutôt de leur analyse en tant qu'oeuvres littéraires d'une part et historiques d'autre part.
On s'attache aux procédés rhétoriques utilisés par Tacite, à la forme de l'écriture, qui montre des liens avec les opera maiora, mais également à l'influence de la politique dans ses écrits historiques. Les opuscules font parfois office de "laboratoires" pour les majora, comme le montre la forme littéraire et la démarche historique des oeuvres.
Se pose également la question de la place de Tacite lui-même, ainsi que des empereurs/tyrans (rôle parfois d'ailleurs en opposition à celui des généraux) et de leurs sujets dans l'histoire qu'il décrit et dans les structures politiques de Rome.
Enfin, l'histoire de l'étude des opera minora - l'historiographie autour d'eux - fait l'objet d'une grande part des travaux, qui dégagent un ensemble d'enseignement littéraires et historiques tirés des écrits de Tacite.
Chaque étude fait référence soit à un des opera minora en particulier (l'Agricola pour Victoria Pagan, Josée Manbwini Kivuila-Kiaku et Dylan Sailor, le dialogue des orateurs pour Dylan Sailor, Raphaëlle Cytermann et Timothy Joseph), soit à l'ensemble de ses oeuvres (Oliviers Devillers, Holly Haynes, Maria Antonietta Giua, Elizabeth Keitel), en lien les unes avec les autres (Isabelle Cogitore) ou avec les majora (Oliviers Devillers, Ellen O'Gorman et Rhiannon Ash).
En conclusion, Les opera minora et le développement de l'historiographie tacitéenne est un ouvrage universitaire dans le fond comme dans la forme. Il constituera sans doute un ouvrage de référence pour les passionnés de littérature romaine, mais reste néanmoins réservé aux meilleurs spécialistes de Tacite et de son oeuvre.
Note : la référence à Groucho Marx dans le titre, fait echo à H. Haynes qui évoque une citation de Groucho pour éclairer un aspect littéraire de Tacite. Un trait d'humour bienvenu dans cette étude plutôt ardue !
Les plus connues de ces oeuvres, qui sont aussi les plus étudiées, sont les Histoires (Historiae, 109 : description de l'empire Romain de la seconde moitié du premier siècle, dont il nous reste seulement la moitié) et les Annales (Ab excessu diui Augusti, 110 : Histoire de la première moitié du premier siècle, en particulier règne des empereurs Tibère et Néron). Ces deux livres constituent les opera maiora - oeuvres majeures.
Les autres écrits de Tacite, appelés opera minora, ne sont pas moins riches - c'est ce que propose de montrer l'ouvrage d'Olivier Devillers que nous présentons ici. Les opuscules, terme qui revient souvent dans l'ouvrage, sont constitués de l'Agricola (De uita Iulii Agricolae, 98 : biographie hommage du beau-père de Tacite, général et sénateur), de la Germanie (De situ ac populis Germaniae, 98 : ouvrage qu'on peut considérer comme le premier travail d'anthropologie de l'Histoire romaine, concernant les barbares germaniques du Nord de l'empire) et du Dialogue des orateurs (Dialogus de oratoribus, 102 ou 107, entretien poético-philosophique sur l'évolution de l'éloquence notamment lié au changement de régime politique).
L'institut de recherche sur l'Antiquité et le Moyen-âge de Bordeaux - appelée Ausonius en référence à Decimus Magnus Ausonius, écrivain et politique aquitain du IVe siècle après JC - présente ici une synthèse après une journée d'échanges entre chercheurs spécialistes de la question tacitéenne. Le livre se présente comme une succession d'articles en français, anglais et italien, fruit du travail de chercheurs français, anglais, italiens, mais aussi américains et même congolais, le tout orchestré et présenté par Olivier Devillers. Une première remarque donc : les travaux étant restitués dans leur langue d'origine, le lecteur aura besoin de bases linguistiques solides, en particulier en anglais (un seul article en italien : celui de Maria Antonietta Giua).
Les publications sont précises, très documentées et référencées, avec beaucoup de notes de bas de page. Une bibliographie très complète accompagne les textes.
Il s'agit non pas de la présentation des écrits tacitéens proprement dit, mais plutôt de leur analyse en tant qu'oeuvres littéraires d'une part et historiques d'autre part.
On s'attache aux procédés rhétoriques utilisés par Tacite, à la forme de l'écriture, qui montre des liens avec les opera maiora, mais également à l'influence de la politique dans ses écrits historiques. Les opuscules font parfois office de "laboratoires" pour les majora, comme le montre la forme littéraire et la démarche historique des oeuvres.
Se pose également la question de la place de Tacite lui-même, ainsi que des empereurs/tyrans (rôle parfois d'ailleurs en opposition à celui des généraux) et de leurs sujets dans l'histoire qu'il décrit et dans les structures politiques de Rome.
Enfin, l'histoire de l'étude des opera minora - l'historiographie autour d'eux - fait l'objet d'une grande part des travaux, qui dégagent un ensemble d'enseignement littéraires et historiques tirés des écrits de Tacite.
Chaque étude fait référence soit à un des opera minora en particulier (l'Agricola pour Victoria Pagan, Josée Manbwini Kivuila-Kiaku et Dylan Sailor, le dialogue des orateurs pour Dylan Sailor, Raphaëlle Cytermann et Timothy Joseph), soit à l'ensemble de ses oeuvres (Oliviers Devillers, Holly Haynes, Maria Antonietta Giua, Elizabeth Keitel), en lien les unes avec les autres (Isabelle Cogitore) ou avec les majora (Oliviers Devillers, Ellen O'Gorman et Rhiannon Ash).
En conclusion, Les opera minora et le développement de l'historiographie tacitéenne est un ouvrage universitaire dans le fond comme dans la forme. Il constituera sans doute un ouvrage de référence pour les passionnés de littérature romaine, mais reste néanmoins réservé aux meilleurs spécialistes de Tacite et de son oeuvre.
Note : la référence à Groucho Marx dans le titre, fait echo à H. Haynes qui évoque une citation de Groucho pour éclairer un aspect littéraire de Tacite. Un trait d'humour bienvenu dans cette étude plutôt ardue !
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